mercredi 16 février 2011

COMMENT L’ENTREPRISE ELARGIE ET "INTEGRALE" REANCHANTE LE MONDE


COMMENT L’ENTREPRISE  ELARGIE REANCHANTE LE MONDE
Un article de Michel Saloff-Coste

Michel Saloff Coste a vingt ans d’expérience dans l’accompagnement de dirigeants et d’équipe de direction. Il a développé une méthode originale de coaching stratégique qui articule Développement du Potentiel Individuel (DPI) et Développement du Potentiel de l’Entreprise (DPE). Ses conférences en Europe, en Amérique et en Asie ont touché plusieurs milliers de personnes. Il est l'auteurs de nombreux ouvrages de références dans le domaines du management.

"Science sans conscience n'est que ruine de l'âme".  Blaise Pascal

"Dans les temps faciles les esprit mécaniques suffisent mais en période de crise il faut du cœur et même du génie" Charles de Gaulle

Rien n'est plus puissant qu'une idée lorsque son temps est arrivé ! Victor Hugo

J'ai souvent été amené à éclairer les entreprises sur leur futur et leur choix stratégique. Mon expérience m'a montré combien il est difficile de distinguer les vrais enjeux. Face à la métamorphose contemporaine du monde les entreprises vont devoir profondément se transformer pour pouvoir être légitimes et continuer a créer de la valeur ajoutée. Le sujet traité dans cet article est la question de l’entreprise élargie : une tendance de fond qui est en train de toucher toute les entreprises en modifiant profondément le rôle futur que peuvent avoir les Ressources Humaines dans les organisations.[1]

Les enjeux des entreprises au cours du XXème siècle ont été souvent marqués par des caractéristiques bien définies :
Une stratégie dominée par la nécessité de résultats trimestriels et donc une dictature du court terme. Cette logique et souvent accompagnée d’une emphase forte donnée à la rationalité. Par ailleurs les intérêts de l’entreprise sont surtout économiques. Pour résumer l’entreprise est essentiellement préoccupée par le court terme, l’économique et la rationalité.
Cette vision de l’entreprise "étroite" est directement liée à la relation forte entre les investisseurs, "stock holders" et l’équipe de direction, chargée d’exécuter une stratégie de retour sur investissement. Ce tropisme s’amplifie jusqu'aux crises à écologique, sociale et économique du début du XXIème siècle. Ces crises interrogent radicalement les entreprises sur leur capacité à créer de la richesse économique mais aussi leur responsabilité sociale et écologique. Ces crises, dans leur radicalité, interrogent la rationalité classique du progrès. Cette vision étroite de l’entreprise apparaît de plus en plus discutable en mesure que l’entreprise est amenée à considérer l’ensemble de ces parties prenantes, "share holders" !

Dans les années qui viennent les enjeux économique mais aussi sociales et écologiques emmèneront des interrogations qui susciteront à juste titre beaucoup d’émotions et de questions philosophiques et spirituelles.

Les entreprises se retrouvent confrontées à ce qu’elles ont souvent voulu évacuer en l'externalisant en dehors de l’entreprise. L’entreprise du futur ne peut plus être seulement économique, à court terme et rationnelle. Il lui faudra de plus en plus se positionner face à des enjeux à long terme, écologiques et spirituels. Elle devra aussi être sociale, gérer le moyen terme et avoir des réponses au désarroi émotionnel de chacun. Ce nouveau défi est c’est que nous appelons "l’entreprise élargie".


Derrière cette évolution se dessine une entreprise qui prendrait en compte le court terme, mais aussi le moyen et le long terme ; une entreprise économique mais aussi sociale et écologique ; d’une entreprise capable de penser rationnellement mais aussi dotée d’une véritable intelligence affective et spirituelle.

Une entreprise de ce type serait capable de faire du profit mais serait aussi capable de traiter humainement ses clients et ses collaborateurs tout en étant capable d’apporter sa pierre dans l’élaboration de la vérité, de la bonté et de la beauté dans le cadre du progrès spirituel de l’humanité.

 Dans la pratique nous sommes encore souvent bien loin de cette entreprise élargie.
Il est clair, malgré tout, que depuis trente ans se construisent petit à petit de nouveaux discours sur l’entreprise qui vont dans le sens de l'entreprise élargie. Il est possible même que la crise économique, la crise de société et la crise écologique précipitent la fin des entreprises dont la vision est trop étroite surtout lorsque par leurs fautes et leur aveuglement des millions de personnes mourront de faims, de soif et verront leur terre inondée par la montée du niveau de la mer.
Un film comme "The corporation" qui a été largement diffusé montre comment la vision étroite de l’entreprise classique justifie des comportements qui sont souvent responsables des crises que nous traversons aujourd’hui. A mesure où ces crises vont s’amplifier, on peut anticiper que les entreprises seront de plus en plus confrontées et critiquées du fait de leur manque de responsabilité globale. Une responsabilité qu'elles n’assument pas du fait de la vision étroite de leur rôle.

Dans cet article nous explorerons, qu'elles sont les caractéristiques d’une entreprise élargie, le rôle particulier des ressources humaines dans ce type d'entreprise et enfin comment développer les talents dans l'entreprise élargie ?

Les caractéristiques d’une entreprise élargie

Les différentes dimensions de l'entreprise élargie peuvent être analysées selon trois axes :

·      un axe de durabilité : Economique, Sociale, Ecologique
·      un axe de temporalité : Courte, Moyenne, Longue
·      un axe de profondeur: Rationnel,  Emotionnel, Spirituel

Les différent axes se suscitent mutuellement : la question de la durabilité amène à se poser des questions de temporalité et à approfondir son questionnement au-delà d'une rationalité étroite.

Approfondissons, tout d'abord, l'axe de durabilité : Economique, Sociale, Ecologique

Le développement durable (ou développement soutenable, anglicisme tiré de Sustainable development) est une conception récente de l'intérêt public, c'est un mode de développement appliqué à la croissance et reconsidéré à l'échelle mondiale afin de prendre en compte les aspects écologiques et culturels généraux de la planète. Il s'agit, selon la définition proposée en 1987 par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement dans le Rapport Brundtland:

« Un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. »
Le philosophe français Michel Foucault aborde ces questions sur le plan épistémologique. Il parle de changements de conception du monde, qui se produisent à différentes époques de l'Histoire. Il appelle ces conceptions du monde, avec les représentations qui les accompagnent, des épistémès. J'ai moi même développé cette approche dans le cadre de mes recherches sur "Le management systémique de la complexité" et "Le management du troisième millénaire"[2] en tentant de dégager les grandes caractéristiques "épistémologique" de l'ère contemporaine. La formule « agir local, penser global », employée par René Dubos au sommet sur l'environnement de 1972, est souvent invoquée dans les problématiques de développement durable. Elle montre que la prise en compte des enjeux environnementaux et sociaux nécessite de nouvelles heuristiques, qui intègrent le caractère global du développement durable. Elle fait penser à la philosophie de Pascal, plutôt qu'à celle de Descartes, celle-ci étant davantage analytique. En pratique, elle devrait se traduire par des approches systémiques.


L'objectif du développement durable est de définir des schémas viables qui reconcilient les trois aspects (économique, social, et environnemental) des activités humaines : « trois piliers » à prendre en compte par les collectivités comme par les entreprises et les individus. La finalité du développement durable est de trouver un équilibre cohérent et viable à long terme entre ces trois enjeux. À ces trois piliers s'ajoute un enjeu transversal, indispensable à la définition et à la mise en œuvre de politiques et d'actions relatives au développement durable : la gouvernance.

La gouvernance consiste en la participation de tous les acteurs (citoyens, entreprises, associations, élus...) au processus de décision ; elle est de ce fait une forme de démocratie participative.

Le développement durable n'est pas un état statique d'harmonie mais un processus de transformation dans lequel l'exploitation des ressources, le choix des investissements, l'orientation des changements technologiques et institutionnels sont rendus cohérents avec l'avenir comme avec les besoins du présent.


Les trois piliers se renforcent mutuellement et sont synergiques les uns avec les autres pour bonifier l'entreprise ; cependant il existe une forte divergence de temporalité entre chacun d'eux. Les entreprises ont tendance à privilégier le pilier économique parce qu'il concerne le court terme, le social, lui, a des effets plutôt à moyen terme et la dimension environnementale concerne le long terme ! Le développement durable oblige donc l'entreprise à élargir sa vision temporelle à envisager le court mais aussi le moyen et le long terme de manière prospective.

C'est ce qui nous amène naturellement à l'axe de la temporalité : Courte, Moyenne, Longue.

L'élargissement de la vision temporelle des entreprises amène naturellement le développement de la prospective.
La prospective est une démarche de prévision et d’analyse des avenirs possibles.
Le terme s'emploie souvent lorsqu'il s'appuie sur des recherches scientifiques variées et des données statistiques traduites en scenarii destinées à éclairer la réflexion pour des choix et prises de décisions stratégiques.
La fonction première de la prospective est de faciliter la prise de décision sur la base de scénarii intégrant les tendances de fond, mais aussi les signaux faibles qui pourraient modifier le cours des choses à court, moyen ou à long terme. L'individu ou le groupe ainsi éclairés peuvent rationaliser ou préciser leurs stratégies afin de moins s subir les évènements pouvant être considérés comme les plus probables. L'exercice impose l'accès à un nombre suffisant de données pertinentes, parfois traduites en modèles ou simplement en courbes de tendance.

Il faut parler d'une démarche prospective car, une prospective efficace se fonde sur des ajustements et des corrections en boucles rétroactives dans le temps. La prise en compte de la prospective par les décisionnaires et différents acteurs de la société modifie elle-même le futur. L'entreprise a travers ce travail de prospective s'engage naturellement rationnellement mais aussi émotionnellement et spirituellement !
Un certain nombre d'entreprises d'avant-garde explore de nouvelles voies stratégiques créatives en "changeant de damier" afin d'échapper à la concurrence frontale induite par les logiques d'excellence mimétique.
Plus l'entreprise est créative et décalée par rapport au contexte, plus elle devient "idéologique" et d'une certaine manière "politique" et "spirituelle" parce qu'elle est porteuse alors d'une "autre" vision du monde. "TF1, Benetton, Habitat ou Nike sont des foyers d'idéologie plus proches, plus présents, plus actifs que la plupart des partis politiques. […] Leur premier métier n'est plus de produire de la valeur ajoutée, mais de dégager des valeurs capables de constituer une identité, de provoquer l'adhésion à cette identité, et de rassembler autour d'elles. Ces entreprises ont réalisé une double conversion exemplaire. Elles ont reconnu dans le produit et le service l'accessoire, dans le sens et les valeurs l'essentiel. Elles ont anticipé le triomphe de l'immatériel. Et elles ont, souvent sans le savoir, sans même le vouloir, compris que le profit découlerait du pouvoir idéologique". [3]




C'est ce qui nous amène logiquement à l'axe de la profondeur : Rationnel,  Emotionnel, Spirituel.

Il existe trois type d'intelligences relativement distinctes[4] :
·    1 Niveau intellectuel formel: logique binaire (oui ou non).
·    2 Niveau émotionnel turbulent: logique intégrative (oui et non).
·    3 Niveau spirituel vide: logique paradoxale (ni oui ni non).

Du fait des nouveaux moyens de communication toutes les informations sont aujourd'hui accessibles. Dès lors, les méthodes stratégiques uniquement rationnelles qui appliquent des modes de traitements identiques aux mêmes informations risquent de produire les mêmes décisions stratégiques.
Seule une stratégie créative "profonde" qui ré-enchante le monde spirituellement, émotionnellement et rationnellement parce qu'elle fait appel à un authentique travail d'inspiration et de vision, peut créer de la valeur à court, moyen et long terme pour l'ensemble des parties prenantes de l'entreprise : clients, actionnaires, fournisseurs, citoyens, planète.
La "stratégie créative en profondeur" est un moyen essentiel pour répondre de façon innovante aux enjeux d'un développement durable, écologique, socialement responsable et néanmoins économiquement rentable !
"La stratégie créative répond à la nécessité pour chaque entreprise de générer en permanence des alternatives non prévisibles et difficilement accessibles aux concurrents, résultats d'un regard inédit porté sur des informations accessibles à tous. Leur génération suppose des moyens importants d'écoute et de réaction pour traiter les signaux faibles de l'environnement, relayés par des moyens de simulation inédits. Cela nécessite des compétences nouvelles en sociologie et en psychologie pour compléter les compétences analytiques classiques et créer ainsi des opportunités de développement inimaginables."[5]
La stratégie de singularisation peut très bien jouer à la fois sur le principe de haut de gamme d'un produit de niche réservé à une clientèle de luxe et sur le principe d'abondance et de faible prix. Un bon exemple est Ikea qui mixe faible prix et design singulièrement prestigieux.
La singularité peut se manifester à travers les produits, les services et la communication qui les porte, mais certaines entreprises sont allées encore plus loin, en réinventant des business models très originaux et en rupture avec l'ensemble de leur industrie.

Les trois niveaux d'intelligence.
La stratégie pour générer massivement de la valeur, décoller et échapper au piège concurrentiel du marché consiste à se distinguer par la création d'une singularité, cette singularité peu être plus ou moins "profonde" et fait appel à différent niveau d'intelligeance.
La manière la plus basique consiste à réaliser une percée scientifique ou technique et à protéger cette singularité rationnelle par un brevet. De manière plus subtile, les stratégies créatives par singularisation de la marque et de l'enseigne développent un univers sémantique (code, couleur, typographie) et émotionnel particulier qui capte et retient l'attention de la clientèle et manipule ses émotions et ses désirs. Plus subtilement encore, il s'agit d'interpeller le client sur le sens de sa vie et lui faire des propositions originales. En l'espace d'un siècle, les logiques de singularisation sont devenues de plus en plus sophistiquées. Nous sommes passé, par exemple, dans le secteur de la communication, de l'annonce à la publicité, pour aller vers la communication globale. Il ne s'agit plus de fournir un produit ou même un service mais de faire vivre au client "une expérience transformationnelle qui convoque son identité et le fait renaître avec une conscience élargie du monde".
Dans ce contexte on peut distinguer trois niveaux d'intelligence et de niveau d'innovation qui s'emboitent :
La première dimension, que nous appelons "formelle", correspond à la dimension logique binaire "oui ou non" ; la deuxième dimension, que nous appelons 'turbulente", correspond à la logique intégrative "oui et non" ; la troisième dimension que nous appelons "vide", correspond à la logique paradoxale "ni oui, ni non".

Niveau intellectuel formel : logique binaire (oui ou non).
L'intelligence rationnelle formelle : (par exemple"1+1=2") est la base de notre compréhension logique. C'est la conscience incarnée dans la temporalité, qui manie plus ou moins le raisonnement systématique rationnel et discursif. La conscience formelle est celle que nous avons lorsque nous nous concentrons sur notre corps, nos sens et notre intellect. La réflexion scientifique est bonne gymnastique pour développer une conscience au niveau formel. On peut parler de "quotient intellectuel" QI pour cerner ce type d'intelligence.

Niveau affectif turbulent : logique intégrative (oui et non).
L'intelligence affective turbulente (par exemple "Je t'aime moi non plus") est la base de notre sensibilité à l'art. C'est la conscience qui s'ouvre au sentiment d'éternité qui nous envahit dans la contemplation artistique.  C'est l'espace de l'émotion amoureuse. L'art est le moyen le plus généralement connu par lequel un individu développe et approfondit sa conscience du niveau turbulent. La conscience du niveau turbulent est celle des affects, des désirs et de la sensibilité. On peut parler de "quotient affectif" QA pour cerner ce type d'intelligence.

Niveau spirituel vide : logique paradoxale (ni oui ni non)
L'intelligence intuitive vide : (par exemple "Dans la vallée de l'indicible s'inscrit le sommet de nos mots") est la base de notre intuition spirituelle.
C'est la conscience qui s'ouvre à l'intemporalité. C'est l'espace de la méditation. La conscience du vide est celle de l'inspiration. On peut parler de "quotient spirituel" QS pour cerner ce type d'intelligence.

Le génie de l'homme est inscrit dans sa dimension spirituelle, il s'exprime dans l'effusion délicate du cœur à travers l'art et vient féconder la raison pour renouveler la science.
Chaque niveau d'intelligence demande du travail pour se cultiver et devenir vivant et  porteur de sens. À chacun des niveaux existent des erreurs à éviter : s'enfermer totalement dans le formel, se perdre dans les circonvolutions du turbulent, projeter notre manque sur le vide.

Jacques Seguéla, , invoque le remplacement de la "copie stratégie" par la "star stratégie" pour l'élaboration de la communication par exemples des "lessives"  qui non seulement lavent plus blanc mais peuvent aussi, grâce à la sémiologie, procurer des illuminations sémantiques aux clients des supermarchés. A ce propos, Thierry Gaudin, ancien Directeur du Centre de Prospective du Ministère de la Recherche, parle à juste titre de communication "hallucinogène". Attention aux dérives ! L'idéologie et l'accent mis sur les valeurs peuvent conduire au totalitarisme. Et que dire lorsque le sens et les valeurs sont portés par un chef charismatique amené fatalement à s'éclipser de l'entreprise ? La singularité peut très vite se transformer en conformisme à l'intérieur de l'entreprise et provoquer des comportements sectaires. C'est au management qu'il incombe d'être vigilant sur les excès possibles.

Cependant nous pouvons bénéficier des lumières de la science sans pour autant nous réduire au matérialisme. Nous pouvons bénéficier des intuitions de la spiritualité sans pour autant planer dans l'idéalisme.
L'idéalisme est contraire à la vraie spiritualité parce qu'il est sous-tendu par l'exorbitante vanité de savoir ce qu'est "l'idéal" et donc de pouvoir en faire un objet. Nous ne sommes plus dès lors dans la "spiritualité" mais dans le fétichisme et Freud nous parle alors avec raison "d'infantilisme psychique" et de "délire collectif": nous tentons de combler nos angoisses par des projections paternelles ou maternelle transcendantes. La vraie spiritualité est, tout le contraire, empreinte de modestie et d'ouverture à l'altérité : ce "tout autre" que nous propose chaque instant dans son caractère unique et singulier. Les témoignages spirituels de toutes les civilisations et de toutes les cultures ont en commun ce message d'amour universel. Il faut être dogmatique pour transformer ces messages d'amour en sectarisme replié sur des formalismes désuets et des articles de foi plus "abracadabrantesque"[6] les uns que les autres. Il y a effectivement "délire collectif" quand ce fétichisme maniaque débouche sur l'holocauste des "autres" ou tout simplement l'ignorance et le désintérêt pour la richesse culturelle de la différence.
Par ailleurs et, malgré les apparences, le matérialisme est aussi peu scientifique que l'idéalisme est spirituel. La science en tant qu'elle est décomposition analytique de processus nous éclaire sur le "comment" mais jamais sur le "pourquoi". Réduire la réalité à des processus sans finalité est pratique pour les décomposer, mais l'expérience quotidienne nous fait expérimenter chaque jour l'extraordinaire propension de tout système complexe à générer, y compris contre notre volonté, des finalités émergentes intrinsèques.
Paradoxalement le matérialisme est aussi une forme d'idéalisme car il "réduit" le réel à "l'idée" que nous pouvons en avoir à partir d'une analyse que la science connaît, par définition pourtant, comme partielle, limitée et relative.

Le vingtième siècle nous aura montré comment le matérialisme sous sa forme dogmatique débouche de la même manière que l'idéalisme et pour les mêmes raisons sur des "délires collectifs".

Luc Ferry a le mérite dans son livre " Qu'est-ce qu'une vie réussie?"[7] de bien montrer comment l'évolution de la pensée philosophique orientale, grecque, judéo-chrétienne et moderne converge, , vers ce ré-enchantement du monde à travers ce qu'il appelle une "spiritualité laïque" et une "conscience élargie". Il montre de manière magistrale comment "la singularité de chacun", "l'intensité de l'instant" et "l'amour de l'autre" sont les moments essentiels de cette vision humaniste qui réconcilie les contraires. Dans ce domaine, il sera aussi intéressant de lire l'œuvre visionnaire de Gilles Deleuze et notamment le livre : Logique du sens[8].

Comment peu à peu au cours des derniers siècles, la création est-elle devenue un enjeu central ?

Dans les sociétés traditionnelles, la nouveauté n'est pas valorisée comme dans nos sociétés industrielles modernes. Dans la société traditionnelle, l'art comme la science sont liés à la religion, et les trois sont confondus dans un corpus de connaissances normatives.

Il faut attendre le XVIIe siècle, le XVIIIe siècle, l'âge des Lumières, la révolution industrielle pour que plus particulièrement en Occident l'art s'autonomise du religieux et rompt son lien à la pensée en tant que "tradition". Cette autonomisation de la science et de l'art est caractéristique de nos sociétés dites "modernes".

L'art en volant de ses propres ailes commença par remettre en cause les thématiques sacrées qui l'occupait jusqu'alors. Il s'intéresse au profane alors qu'il n'avait dépeint pendant des millénaires que des sujets sacrés.
L'art, devenu libre, explore les émotions et invente des expressions romantiques pour tenter de représenter les différents élans de l'âme. Il développe une créativité croissante à travers la diversité des sujets traités et la sophistication de l'expression.

Curieusement la société industrielle, empreinte de rationalité, suscite, par contraste, une revendication croissante des artistes à exprimer les élans de leur cœur. L'époque industrielle est traversée par la tension paradoxale entre rationalité de la pensée scientifique et le romantisme de l'art. L'art, après avoir libéré sa thématique, remet en cause de manière de plus en plus créative les modalités même de son expression à travers le pointillisme, le cubisme, l'abstraction et finalement l'art conceptuel.

L'art du XXe siècle est un des plus complexes de l'histoire de l'humanité. Les avant-gardes sur l'ensemble de la planète se lancent dans une course à l'innovation et à la création en remettant en cause tous les a priori qui présidaient à l'art académique du XIXe siècle. C'est au XXe siècle dans les sociétés modernes que la création devient une valeur en soi dans le domaine de l'art. Être créatif devient vital pour un artiste s’il veut exister. Il ne s'agit plus comme autrefois de bien maîtriser son métier et d'interpréter académiquement un sujet, il faut être capable d'inventer une expression novatrice. La vie d'artiste avec son excentricité, sa liberté et sa créativité fait contraste avec les habitudes "bourgeoises" qui dominent la société de cette époque. À cette époque, Si la création est devenue une valeur, elle se cantonne principalement au milieu de l'art et concerne une population restreinte et élitiste : il y a, d'un côté, le monde sérieux du travail et de l'entreprise en général et, d'autre part, le petit milieu excentrique et créatif de l'art qui vit en marge de la société.

Cette manière de séparer les choses commence à changer à partir des années 60 et 70. La génération du "baby boom" arrive à l'âge adulte avec un niveau d'éducation élevé et remet en cause cette séparation entre la création et la vie quotidienne. Cette génération revendique la liberté créative d'échapper au caractère normatif de la vie traditionnelle en société. L'entreprise qui depuis ses origines a été l'espace d'une "critique sociale" connaît alors une "critique artiste"[9]. Cette nouvelle "critique artiste" accuse l'entreprise d'avoir instrumentalisé l'homme en tuant toute forme de créativité dans le travail. Parallèlement, l'efficacité même de la production sature les marchés. Le passage d'une économie de la demande à une économie de l'offre introduit l'innovation comme un facteur clé de compétitivité.

Dans les années 70, le désir d'une vie plus créative qu'exprime la génération de 68 est mis au service de la création de valeur des entreprises. Les entreprises ont besoin d'idées afin de se diversifier dans le contexte d'une concurrence accrue. Ce mouvement s'amplifie, la nouveauté qui était à l'origine un "plus" devient une condition nécessaire pour exister.

Ce qui fait la valeur, ce n'est plus la capacité de production. Il est malheureusement classique aujourd'hui de produire en masse des produits et de ne trouver aucun débouché. Ce qui permet d'écouler et de vendre avec profit un produit, c'est la " nouveauté" le caractère créatif et innovant du produit.

Les facteurs clés de valorisation "l'industrie et le commerce" sont remplacés par la "création et la communication".

Ce nouvel état de l'économie modifie le rapport qu'entretient le dirigeant à l'outil de production et au capital mobilisé par l'outil de production. Ce couple, le capital et l'outil de production, qui est au cœur du processus de création de valeur de la société industrielle est marginalisé. Ce qui devient essentiel, c'est l'accès à l'information et la capacité à créer une information nouvelle innovante. C'est dans ce contexte que l'on peut parler du passage de la "société industrielle" à la "société de l'information" et considérer que dans la "société de l'information" les facteurs clés de valorisation "l'industrie et le commerce" sont remplacés par la "création et la communication"[10].

La perte de valeur des biens devenus des ensembles virtuellement infinis, hystérisent intensément l’exploitation de l’homme par l’homme. Il faut aller toujours plus vite, être toujours plus efficace, plus rusé, plus conquérant. Et pourtant chacun semble de moins en moins avoir prise sur une économie qui se dérobe dans une concurrence imprédictible et toujours plus intense. [11]

Il s’agit de faire des bonds toujours plus grands sur une peau de chagrin de plus en plus réduite.

Il n’y a plus de référents, en fait c’est toute la forme de valeur qui a été siphonnée. La course à la création de valeur est d’autant plus intense que la valeur des produits est sans cesse vidée de sa substance par une déflation rampante - l’économie du virtuel ronge l’économie du réel, les atomes sont remplacés par des bits reproductibles à l’infini. Plus on instrumentalise plus, quelque part, on détruit de la valeur car l’instrumentalisation n’a plus cours quand la démultiplication à l’infini a une valeur qui tend vers zéro.

Y a-t-il encore des valeurs ? Quand tout est même, quand tout devient interchangeable, dans une économie de «zéro» et de «un» qui explose à l’infini, la seule valeur qui subsiste reste celle de l’altérité.  Comme dans un coup de théâtre, les valeurs s’inversent.  Ce qui était honni et n’avait aucune valeur devient l’essence de la valeur. Ce que chacun adorait comme la valeur suprême perd tout à coup sens.

L’homme instrumentalisé, le clone si efficace au cerveau robotisé, devient un clown. Dans un monde de robots, la seule valeur radicale qui subsiste est la poésie. Être authentique, être unique, être génial, trouver en soi son propre référent et sa propre loi, comme le fait tout créateur au cœur de sa création, voilà la seule valeur qui subsiste à la fin. Quand le réel se délite, la mode n’est plus à la mode, seule l’éternité s’impose.

Comme dans les dessins d’Escher, la main qui tient le crayon est aussi celle qui dessine la main. Si aujourd’hui la création est devenue importante, vita-le, « capitale », elle est finalement peu enseignée et souvent mal comprise. Qu’est-ce que la création ? Pourquoi le concept est-il difficile à comprendre derrière son évidence ? Définir un terme implique de faire appel à un système de référence. C’est en stabilisant un système de référence qu’un terme peut s’inscrire en tant que savoir académique et devenir enseignable. Or, l’acte de création est par essence rupture : il existe parce qu’il rompt avec les systèmes de référence préétablis. Être créatif, c’est d’une certaine manière détruire les références existantes, c’est changer de paradigme comme Kuhn  l’a très bien expliqué.

Une création n’est pas un nouvel objet que l’on regarde. Une création est une nouvelle manière de regarder le monde.
C’est en cela que la création rompt l’ennui et renouvelle le désir. Vouloir enfermer la création et le processus de singularisation dans un savoir est certainement contre-productif ; on peut néanmoins tirer un enseignement de ces paradoxes. Changer de lunettes, de manière de voir, de système de représentation est toujours favorable à la création. Le DRH doit être convaincu de cela pour pouvoir libérer et faire émerger des environnements favorisant l’invention, l’innovation et la création.

Le rôle particulier des ressources humaines dans l’entreprise élargie.

Après l'emphase sur la production dans les années cinquante, le marketing dans les années soixante dix, la finance dans les années quatre-vingts dix, ne sommes nous pas rentrés dans l'ère des ressources humaines avec le changement de millénaire ?
Le département des ressources humaines est au cœur des enjeux de l'entreprise élargie !
Le directeur des ressources humaines peu trouver dans l'entreprise élargie, l'occasion d'un véritable renouvellement de sa fonction et voir son influence considérablement accrue. L'entreprise élargie est une entreprise qui se réinvente d'instant en instant par la participation collective et créative de toutes ses parties prenantes.
La globalisation de l’économie a intensifié simultanément les deux logiques :
·      Se comparer et copier les pratiques des meilleurs pour rester dans la course. On attend du DRH qu’il soit le garant du professionnalisme au sein de l’entreprise.
·      Se différencier et remettre en cause les règles du jeu afin d’échapper à la concurrence. Le DRH est inviter à valoriser les pépites que sont les singularités de l'entreprise mais aussi le génie singulier de chaque collaborateur !
·       
De manière générale, le DRH et l’équipe de direction auront avantage à naviguer dans les deux logiques avec aisance. La bonne connaissance des meilleures pratiques à l’échelle mondiale sera vitale, mais le développement personnel des managers sera nécessaire aussi afin qu’ils puissent être des inspirateurs de singularité. L’équilibre entre mimétisme et singularité dépendra du projet de l’entreprise et de la vision que le DRH et son équipe auront construits. L’équilibre optimal variera en fonction des industries, des secteurs, des pays et des cultures concernés. En amont de tout déploiement stratégique, il est fondamental de réfléchir à la part de singularité que l’on veut donner à son entreprise. Les choix mimétiques auront avantage à être complètement assumés pour faciliter leur application de manière pleinement mécanique. Inversement, les espaces laissés à la singularité auront avantage à être pensés, explicités et protégés si l’on ne veut pas les voir détruits par les habitudes et la multiplication des mécanismes transversaux.
L’appel à la créativité interne n’est possible que si le corps social de l’entreprise partage une vision et des valeurs fortes et n’est pas complètement instrumentalisé dans le quotidien. Ce qui est vrai pour le corps social est a fortiori vrai pour l’équipe de direction. Le DRH et son équipe auront intérêt à « s’imposer » des moments de ressourcement pour relever la tête du guidon, se cultiver, réfléchir au contexte et au sens de leur action, et bien équilibrer mimétisme et singularité dans leur management.

Dans ce cadre, le rôle du DRH est de créer de la cohérence à partir de la diversité et plus largement d’orchestrer la valorisation des talents de l’organisation. Dans un contexte de création les individus ont besoins d’être reconnus dans leur singularité et leur altérité. Le DRH crée de la valeur à partir des talents implicites ou explicites, son rôle est de révéler le génie de chacun en synergie avec tous.

















A la recherche du génie……..[12]

L'ego, la personnalité et le génie, sont une manière de décrire l'intégration successive que peut connaître un être humain dans la découverte de lui-même à travers le processus de création.
L'Ego est la partie de nous qui est enfermée dans le niveau formel de notre personnalité. Dans un premier temps, nous découvrons notre ego, c'est-à-dire notre corps, notre capacité à nous souvenir, notre capacité à réfléchir et petit à petit, l'ego s'agrège au point de nous enfermer dans sa logique. On peut être très intelligent, avoir une culture immense, et être enfermé, comme dans une prison dans notre ego. Le mental n'arrête pas de réfléchir, de calculer et plus il le fait, plus l'ego se gonfle de son savoir. Mais tout ce savoir accumulé, bien qu'il ait une valeur en soi, ne nous apporte que peu face au jaillissement de la vie, face au changement. Une personne enfermée dans son ego même si elle est très savante et intelligente est toujours un peu ennuyeuse, car n'ayant pas encore su créer son style propre, elle ne déclenche pas d'émotions.
C'est pour cela qu'au-delà de l'ego, le problème de tout être humain est de trouver sa personnalité. La personnalité est, au-delà du savoir accumulé, la capacité à créer son style, de manière originale.  La notion de style peut paraître superficielle, cependant ce qui différencie un "Mozart" d'un autre musicien, c'est justement cette capacité à créer un style musical nouveau. Développer sa personnalité n'est pas de l'ordre de la science, ni du savoir, cela est de l'ordre de l'art, de la sensibilité. Si l'ego est la dimension formelle de l'être humain, la personnalité est de l'ordre du turbulent. On devient une personnalité lorsque quel que soit son domaine d'activités, au-delà du savoir, on sait développer un style qui nous est propre. On devient une personnalité lorsqu'on sait faire de chacun des actes de sa vie courante, une création artistique. Le travail sur la personnalité implique que l'individu sache explorer son inconscient et enrichir sa vie formelle par toute la richesse turbulente de son inconscient. Le style s'affirme dans la mesure où l'ego s'ouvre à l'inconscient et accepte d'en témoigner. La personnalité se développe à mesure que l'individu développe son contact avec la sensibilité, les émotions, les rêves, les désirs.
Le troisième niveau, le génie, est une intégration encore plus profonde que l'on peut situer au-delà même de la personnalité. Si la personnalité est de la dimension de l'art, le génie fait référence à l'expérience de la dimension spirituelle de l'Homme, cette dimension est transpersonnelle. Le psychologue Carl Jung a montré comment, à partir d'un certain degré d'intégration de la personnalité et de l'inconscient individuel, l'être humain peut accéder à une conscience qui dépasse les limites de la personne, il a nommé cela "l'inconscient collectif". L'inconscient collectif est transpersonnel, car l'individu y découvre des archétypes, des structures fondamentales, qui sont l'essence même d'où émergent les différents types de consciences de la réalité. À travers l'inspiration et l'expérience spirituelles de la découverte de l'inconscient collectif, l'individu accède à un au-delà de la matière, un au-delà de l'énergie, un au-delà de l'espace et du temps, qui lui donnent l'intuition des processus qui président à la création. La personnalité, quand elle accède à "l'inconscient collectif", se ressource au cœur de la matrice universelle des grands archétypes structuraux et peut s'affirmer dans toute sa singularité, son génie. Quand la personnalité est en contact avec son génie, le style est magnifié, il est enrichi d'une profondeur de sens qui est caractéristique de la "sagesse".
On retrouve dans les écrits de la plupart des personnalités en contact avec leur génie, des témoignages de rencontres avec la dimension d'inspiration; ces témoignages sont caractérisés par leur dimension spirituelle : Descartes, Einstein, Van Gogh, Spinoza, Platon... la liste est grande.
Il n'y a pas, à ma connaissance, de personnalité, qui ait marqué l'humanité de manière fondamentale, qui n'ait laissé des témoignages de l'expérience du contact avec cette dimension d'inspiration spirituelle.
L'analyse de ces textes montre qu'au-delà des caractéristiques liées à la culture et à l'époque, on y retrouve des traits communs.
Ainsi, même si le voyage de l'individu à travers son ego, sa personnalité et son génie est une expérience par définition subjective et intime à chacun, elle est rendue de plus en plus étudiable objectivement à mesure que nous accumulons des témoignages sur ce processus.
Tout être humain peut accéder au génie ; ce qui nous en empêche est surtout lié à aux systèmes de croyances culturelles qui nous enferment dans notre égotisme.
Jusqu'à ce jour, la plus grande partie de l'humanité était engagée dans des tâches laissant peu de place à la valorisation du génie. Il faut, comme aujourd'hui, que les besoins de l'Homme en nourriture et technologies soient assouvis pour une masse croissante d'individus, pour qu'un nombre grandissant d'individus puissent se consacrer à la découverte de leur personnalité et de leur génie.
L'art est l'espace d'expression et de sublimation de nos contradictions entre l'intuition inspirée du spirituel et la réalité pragmatique de la science. Le monde est un grand jeu de la conscience qui nous propose constamment de nouvelles épreuves pour nous faire grandir à la fois dans notre présence au monde et dans notre distanciation.
Notre présence augmente notre capacité à être auteur de la réalité, notre distance nous permet de goûter la réalité avec un amour inconditionnel.

La maîtrise de l'information est un facteur fondamental de réussite que ce soit pour les individus, les entreprises ou les Etats. Il existe actuellement une pléthore d'informations. Le problème n'est plus tellement d'avoir l'information, mais plutôt de savoir naviguer à l'intérieur tel un bateau au milieu de l'océan.
L'accumulation même du savoir nous lance un nouveau défi, il nous faut un nouveau savoir, le "savoir évoluer dans le savoir". Et ce "savoir évoluer dans le savoir" pose un problème habituellement évacué dans les systèmes de connaissances classiques, le problème du cadre de référence, c'est-à-dire comprendre sur quel système de valeurs, à partir de quels critères je considère qu'une information est importante pour moi.
Dans le cadre classique de la diffusion du savoir de l'âge industriel et commercial, le problème était résolu par la spécialisation. Dans le cadre de l'âge de la Création-Communication où l'individu cesse d'être un spécialiste pour se déployer dans son génie spécifique, toute acquisition de connaissances passe par un examen de conscience approfondi de la direction dans laquelle chacun veut se diriger.
Ainsi, contrairement à l'âge industriel où apprendre suit un processus en quelque sorte mécanique d'accumulation de savoir, l’âge Création-Communication au contraire, développe une nouvelle approche de la connaissance qui part d'une question essentiellement philosophique et spirituelle :
Que suis-je venu faire sur la terre ? 
Que puis-je apporter de meilleur à la planète ?


Comment développer les émergences créatives


Observation, expérience et recherche avec des entreprises d'avant-garde permettent de dégager quelques grands facteurs à cultiver pour favoriser les émergences créatives :
Multiplicité : La richesse des connexions d'un réseau est multipliée par la puissance carrée du nombre des agents de connections.
Connectivité : Il faut que les agents soient très interconnectés pour faciliter les échanges.
Densité : Une faible distance entre les agents est nécessaire.
Diversité : C'est l'altérité de chaque agent, sa différence, qui enrichit la qualité de l'information qui passe dans le réseau.
Intensité : La passion dans l'échange et dans l'élaboration de sens nouveaux multiplie les interactions fructueuses.
Liberté : Les agents doivent se sentir libres d'exprimer leur différence.
Jeu : Il a été démontré que les processus d'apprentissage et d'échange informationnel sont facilités quand ils prennent la forme de jeux.
Détachement : Pour accepter de perdre ses anciens points de repère et accepter les remises en causes.
Humour : Afin de rire de la fracture des systèmes de représentation apposés les uns sur les autres dans les processus de création.
Distanciation : La seule manière de vivre sereinement les "tempêtes de l'esprit" par les "brainstormings" créatifs.
Subsidiarité : Les problèmes doivent être solutionnés par ceux qui sont concernés. Bien délimiter les zones rouge et bleue[13] de chacun à son niveau.
Systémique : Une bonne connaissance des théories systémiques permet une meilleure compréhension de la complexité et du phénomène d'émergence.
Intégrité : La navigation dans les flux tourbillonnants de l'information implique une très grande sécurité ontologique qui ne s'acquiert que par un long travail psychologique sur soi d'intégration et de développement personnel.
Vérité : Ne pas falsifier la bonne information, mais aussi, ce qui plus exigeant, savoir exprimer avec acuité, pertinence et assertivité la vérité de sa différence.



Le nouveau serment d’Archimède[14]



1. Je pratiquerai ma profession dans le respect d'une
éthique des Droits de l'Homme et de la responsabilité du
patrimoine naturel de l'Humanité.

2. J'assumerai, dans tous les actes de ma vie profession-
nelle, ma responsabilité vis-à-vis de mon institution, de
la société et des générations futures.

3. Je veillerai à promouvoir le respect des rapports équi-
tables entre tous les hommes et à soutenir le développe-
ment des pays économiquement défavorisés.

4. Je veillerai à expliquer mes choix et mes décisions
dans la plus grande transparence possible à l'égard des
décideurs et des citoyens.

5. Je serai attentif à favoriser, dans l'exercice de mes
fonctions, les formes de management qui permettront
une large coopération de tous les acteurs, afin de don-
ner du sens au travail de chacun et à l’innovation.

6. Je m'engage à porter la plus grande attention à
l'expression de l'esprit critique et au respect de la déon-
tologie dans l'usage des moyens d'information et de
communication.

7. Je serai attentif à compléter de manière continue mes
compétences professionnelles dans tous les domaines
des sciences technologiques, économiques, humaines et
sociales requises par l'exercice de mes fonctions.




[1] Le management du troisième millénaire  aux éditions Guy Trédaniel en 1991, 1999 et 2005
[2] Le management du troisième millénaire  aux éditions Guy Trédaniel en 1991, 1999 et 2005
[3] Le management du troisième millénaire Pascal Baudry Hervé Juvin : Entreprise créer du sens
[4] Trouver son génie aux éditions Guy Trédaniel 2005
[5] Simon Free, Les stratégies de la transformation dans L'art de la stratégie, Village Mondial, 2000.
[6] Néologisme créer par Rimbaud et popularisé dans la langue française usuel au court de l'année 2000 par le président de la république Jacque Chirac en réponse à une question d'un journaliste. ABRACADABRANTESQUE, adj. Néol. d'aut[eur]. Qui ressemble à ce qui est abracadabrant : Ô flots abracadabrantesques. Prenez mon cœur, qu'il soit lavé! Ithyphalliques et pioupiesques. Leurs quolibets l'ont dépravé! Arthur Rimbaud, Poésies, « Le Cœur volé », 1871, p. 100.
[7] Luc Ferry, Qu'est-ce qu'une vie réussie ?,Edition Grasset, 2002
[8] Gilles Deleuze, Logique du sens, Les éditions de minuit, 1969
[9] Luc Boltanski, Eve Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Gallimard, 1999.
[10] Le dirigeant du troisième millénaire aux éditions de l’organisation 2006
[11] Les Horizons du Futur aux éditions Guy Trédaniel en 2001
[12] Trouver son génie aux éditions Guy Trédaniel 2005
[13] La Revue de Kea&Partners numéro 5 "Les conditions de la mise en mouvement des hommes" - Jacques Jochem - Janvier 2005
[14] Manifeste pour la technologie au service de l’homme, Institut National Polytechnique de Grenoble, 2000.

1 commentaire:

Pierre Clause a dit…

Merci pour ce très bel article avec lequel je me sens tout à fait en résonance ... et qui me motive à m'inscrire à la journée du 19 février !

Pierre Clause