Nous sommes à un point de rupture (les anglo-saxon parlent de turning point) ou les anciens modes de pensée perdent leur légitimité et laissent la place à une nouvelle manière d’organiser la connaissance. Les premières grandes Universités se sont développées en France donnant naissance à la Sorbonne qui existe encore aujourd’hui. Ces premières universités, qui se sont développées un peu partout dans le monde jusqu'à la fin de l’ère agraire, ont été le plus souvent sous le Joug spirituel de la pensée religieuse traditionnelle et locale. Les universités dans le monde se sont autonomisées et ont développé une épistémologie laïque à partir de la Renaissance et plus particulièrement encore dans le cadre de la révolution industrielle. Cela a correspondu à une nouvelle vague de civilisation et à une transformation complète du contexte planétaire.
De nombreux analystes de l’évolution planétaire considèrent que nous sommes rentrés depuis 10 à 20 ans dans une deuxième transformation majeure : le passage de la société industrielle à la société d’information, qui suivant l’angle sous lequel on l’analyse et le comprend, est aussi appellé «Ere de la Création et de la Communication » ou « Economie Cognitive ».
Dans le cadre de cette transformation planétaire il est probable qu’Internet joue un rôle similaire à l’imprimerie dans la révolution précédente en permettant à l’humanité de franchir une nouvelle marche de son évolution. L’imprimerie nous a permis de devenir tous des lecteurs, Internet nous permet aujourd’hui de devenir tous des auteurs.
Dans le cadre de cette nouvelle vague de civilisation, comme précédemment, le cadre des références dans laquelle se construit la connaissance est profondément transformé.
Pour comprendre une mutation de cette ampleur nous sommes obligés d’enraciner notre réflexion dans l’épistémologie, qui au cœur de la philosophie, se définit comme la connaissance de la connaissance. Les crises financières, économiques, sociales et écologiques que nous traversons aujourd’hui correspondent à la fin de la société industrielle. Elles ne peuvent être comprises et dépassées que dans une approche contextuelle plus large qui nous encre dès aujourd’hui dans le futur de la civilisation et des approches cognitives nouvelles.
Le mouvement « intégrale » qui s’est cristallisé à travers une nouvelle approche de la connaissance du monde, se révèle depuis un siècle au cœur des problématiques liées aux conditions d’émergence d’une nouvelle civilisation adaptée aux enjeux contemporains, économiques, sociaux et écologiques.
Nous avons aujourd’hui la chance dans cette deuxième journée inaugurale de l’’ Université intégrale de partager nos réflexions avec un certain nombre de penseurs et d’activistes de l’approche intégrale dans le monde.
Pourquoi et comment ont-ils compris l’importance de l’approche intégrale ?
Comment la philosophie intégrale a transformé leur vie et comment ont ils positionné leur propre pensée dans le cadre des différents courants qui animent ce mouvement international ?
Comment se positionnent leurs réflexions dans le contexte contemporain et la crise actuelle ?
Comment ont-ils intégré l’approche intégrale dans leur propre vie et quelles sont leurs propositions dans ce domaine ?
L’approche intégrale nous invite à une révolution de la conscience mais aussi des connaissances scientifiques, artistiques et spirituelles. Un vrai développement de la civilisation implique que nous soyons capables de nous relier culturellement d’une nouvelle manière et donc de vivre en société un dialogue renouvelé et des relations de co-création collectives, infiniment plus complexes et riches que par le passé. Cette nouvelle culture appelle le renouvellement de l’ensemble des institutions de notre société, l’élaboration de nouvelles lois, de nouvelles constitutions, de nouvelles institutions dans le cadre d’une véritable gouvernance planétaire à l’échelle mondiale.
Ervin Lazslo et Thierry Gaudin, l’un dans le cadre de l’ONU et UNESCO, l’autre dans le cadre du Ministère de la Recherche en France, ont été parmi les premiers, il y a plus de trente ans, à être sensibles à cette évolution et à concentrer leurs recherches et leurs écrits sur ces grands enjeux de transformation sociétale.
C’est pourquoi nous leur reconnaissons le privilège d’avoir été parmi les premiers à fonder les bases de cette nouvelle vague de civilisation qui devient aujourd’hui chaque jour un peu plus d’actualité à travers la crise économique, sociale, écologique et financière, de la civilisation précédante.
Pendant cette journée nous compléterons nos réflexions par des témoignages de personnalités qui chacunes, de manière très différente, se sont engagées dans le mouvement intégral et ont participé activement à sa diffusion tout en vivant à titre personnel une transformation radicale de leur mode de vie au quotidien.