De la fin de la première guerre mondiale à Bretton Woods
Au lendemain de la première guerre mondiale tous les pays d'Europe sont écrasés par les dettes. Partout la masse monétaire s'est multipliée de façon anarchique, le problème des prix et des parités empoisonne les échanges internationaux. En Allemagne l'effondrement du mark est tel que Max Warburg affirme, en 1923 « Le mark a perdu l'appellation de monnaie, il est devenu une simple illusion… » Si le franc s'est relativement maintenu durant la guerre, la France doit solder sa dette de guerre. Elle a cru pouvoir faire face grâce aux réparations, mais les atermoiements allemands, le refus de Etats Unis de lier le remboursement de la dette aux paiements de l'Allemagne, ont entraîné la chute du franc.
Le monde aspire au retour à l'ordre ancien, celui de la prospérité d'avant 1914. Ce sont les financiers Montagu Norman[1], gouverneur de la banque d'Angleterre et Benjamin Strong vice-président de Morgan Bankers Trust qui, dans les années 1920, vont prendre la tête de la croisade, déterminés à utiliser la puissance financière de la Grande Bretagne et des Etats-Unis pour faire entrer les banques centrales nationales dans un système indépendant des gouvernements.
Ces têtes pensantes n'étaient que les agents des banques d'investissement dominantes de leurs pays... La véritable puissance financière du monde était entre les mains des banquiers internationaux qui demeuraient largement en dehors de la scène publique. Au XIXème siècle ces puissances avaient été incarnées, en Europe, par les Rothschild de Francfort, Londres, Vienne et Paris. Au XXème siècle c'étaient les Morgan transfuge de la banque Peabody de Londres, Rockefeller, traduction littérale du patronyme de l'ancêtre allemand Steinhauer, Schiff, émigré d'Allemagne, qui tenaient les leviers d'un pouvoir désormais établi outre Atlantique.
Le point de vue des banquiers fut exprimé dans une série de conférences internationales entre 1918 et 1933 : Comité Cunlife[2] de Grande Bretagne (août 1918), Conférence d'Amsterdam[3] (octobre 1919), Conférence de Bruxelles des experts (septembre 1920), Conférence du conseil suprême de Gènes (janvier 1922)…. Toutes plaidaient invariablement en faveur de l'étalon or, de l'équilibre budgétaire, de la parité des prix internationaux, de la réduction des impôts et des dépenses de l'Etat, de la liberté du commerce, de l'interdiction du protectionnisme et, plus généralement, de la prévention des ingérences gouvernementales dans l'activité économique. Le contrôle de la puissance publique s'était en effet développé à la faveur de la guerre et les banquiers aspiraient à recouvrer leur autonomie.
Mais aucune des évaluations de la situation ne s'élevait à la hauteur des changements profonds intervenus depuis la fin du siècle et dont la crise de l'après guerre n'était peut-être que le révélateur. L'industrie britannique vieillissante se heurtait aux konzern qui s'étaient développés en Allemagne sous l'Office des matières premières qui gérait les productions de guerre et aux trusts américains apparus à l'avant-veille du conflit. La révolution industrielle s'était étendue d'Europe à l'Amérique du Sud, à l'Asie, et l'Empire britannique avait perdu ses débouchés traditionnels s'il ne rencontrait pas de nouveaux compétiteurs industriels et agricoles... Les rapports de forces étaient ébranlés et la suprématie politique, financière, commerciale, maritime de la Grande Bretagne était en déclin.
Les efforts financiers après 1918 demeuraient concentrés sur un objectif aussi simple que superficiel : Le retour au principe de l'étalon et aux parités monétaires d'avant 1914. L'enjeu n'était pas du ressort d'un simple acte volontaire fut-il celui des gouvernements. Les avocats les plus fervents de l'étalon or admettaient eux-mêmes que l'harmonisation préalable de l'inflation, des déficits publics, de la parité des prix, était impérative. Ce qui constituait un cercle subordonnant restauration de l'étalon or aux effets qui en étaient attendus.. .
Le Conseil Suprême de Gênes et le gold exchange standard
La décision la plus significative fut prise par le Conseil Suprême de Gênes de 1922. Sous le régime classique de l'étalon or, chaque devise était définie par un certain poids d'or et les paiements internationaux étaient effectués le plus souvent avec ce métal, ce qui entraînait de dispendieux transferts à charge des banques centrales. La création monétaire n'était autorisée que sur la base de l'encaisse or ou des créances libellées en monnaie nationale (bons du trésor ou effets de commerce.) La banque d'émission ne pouvait conserver les devises qu'elle recevait, elle devait les offrir sur le marché des changes ou demander leur remboursement or à l'Etat émetteur, provoquant ainsi un effet stabilisateur de la monnaie. La résolution 9 du Conseil de Gênes, sous couvert d'« économie dans l'usage de l'or par le maintien de balances à l'étranger » introduisait une révolution silencieuse sous une appellation ambiguë et souvent mal comprise… : « l'étalon de change or » ou « gold exchange standard. » Non seulement les paiements internationaux pouvaient être effectués en livres ou en dollars, mais les banques centrales étaient invitées à détenir dans leurs réserves des devises convertibles livres sterling ou dollars en contrepartie de l'émission monétaire. Jacques Rueff qualifiera de pernicieux ces principes confirmés par le comité financier de la Société des nations entre 1922 et 1930. On attendait une restauration de l'étalon or et le Conseil suprême de Gênes aboutissait à sa destitution partielle. L'émission monétaire se trouvait ainsi fondée, à coté de l'or, sur deux monnaies nationales : la livre qui voyait ainsi sa survie pérennisée et le dollar qui faisait son entrée sur la scène internationale. En 1924, Benjamin Strong, alors Gouverneur de la Réserve Fédérale, écrivait à Montagu Normann : « Le dollar c'est de l'or, le dollar est donc une monnaie de réserve. » Et réciproquement !
En vertu de ces principes la livre et le dollar auraient dû rester stables[4] et surtout les pays émetteurs - Angleterre et Etats-Unis - étaient astreints à conserver une encaisse or solvable au regard de la masse monétaire. Il n'en sera rien. La pratique qui consistait à asseoir l'émission monétaire sur des monnaies papier était par essence inflationniste. L'étalon de change or va donc poursuivre sa carrière mouvementée.
En Allemagne, Hjalmar Schacht, nommé commissaire à la Monnaie après la crise de 1923[5], puis président de la Reichsbank, avec rang de ministre, décrète l'inconvertibilité du mark. Il met en œuvre une monnaie provisoire, le rentenmark (ordonnance du 15 octobre 1923) assis sur le redressement industriel de l'Allemagne, c'est à dire sur des ressources futures, et une hypothèque sur les biens industriels et les chemins de fer, ce qui constituait une étonnante innovation. Il laisse filer le déficit budgétaire, afin de faire jouer les échappatoires aux réparations[6], accélérant ainsi la dévaluation[7] du mark. Les crédits consentis par la Rentenbank, banque privée dont les capitaux ont été avancés par les industriels, étant limités, Schacht lui adosse, le 15 mars 1924, la Gold-Diskonto-Bank dont le capital entièrement versé en livres sterling appartient pour moitié à la Banque d'Angleterre. La Gold Diskonto-Bank, ultérieurement rattachée à la Reichsbank, canalise les crédits à l'Allemagne et ses créances sont escomptées à Londres. Le mécanisme a été organisé avec le soutien de Montagu Norman, qui sera parrain d'un des enfants de Schacht. Les dollars véhiculés par le plan Dawes de 1924 ajoutés aux sterling de la Reichsbank vont permettre le redressement du mark. Comme l'avait indiqué Lloyd George à la conférence de la paix « Je voudrais inscrire en frontispice de la Conférence de la paix l'idée suivante : dès que l'Allemagne aura accepté nos conditions…nous ferons tout notre possible pour rendre le peuple allemand capable de se remettre sur ses jambes. »
En avril 1926, la France met en application le système de l'étalon de change or. De 1927 à 1931 Français et Américains acceptent de conserver à Londres des comptes en livres sterling, sans en demander le remboursement en or. Mais, le 25 juin 1928, face à l'effondrement du franc, la France s'affranchit de l'étalon de change or. Le franc Poincaré est alors défini en fonction de sa seule contrepartie à 65,5 milligrammes d'or au titre de 900 millièmes. Relativement au franc germinal, la dévaluation était de 80%. C'était « le franc à quatre sous. »
Dans les années 1930, la crise industrielle et financière s'est accélérée en Grande Bretagne et les mesures de déflation maladroitement prises par Montagu Norman portent les tensions sociales à leur comble. La faillite de la banque autrichienne Oesterreischische Kreditanstalt fûr Handel und Gewerbe, en mai 1931, se répercute en juillet sur la banque allemande Danat, puis en Angleterre dont les crédits accordés à l'Allemagne sont gelés. La réserve d'or britannique s'effondre au point que Paris, qui a demandé le remboursement or des sterling qu'il détient, a refusé les lingots « détimbrés » présentés par la Grande Bretagne. Le 21 septembre 1931, le gouvernement de Sa Majesté annonce l'inconvertibilité de la livre. Le sterling dévalué de 30% est déchu du système du Gold Exchange standard. La crise s'étend à tous les détenteurs de sterling et en particulier à l'Allemagne, facilitant la montée des partis extrêmes…
La Grande Bretagne se réfugie dans le système des « préférences impériales[8] » et se barde de mesures protectionnistes[9], alors même que la dévaluation de la livre devrait la protéger des importations. Le monde est désormais divisé en deux groupes : le groupe sterling d'une part, autour de l'Empire britannique, étendu à Norvège, Suède, Danemark, Argentine et le groupe-or d'autre part, constitué autour des Etats-Unis, de la France, des Pays-Bas, de la Belgique et de la Suisse.
Seul demeure le dollar dans les réserves des banques centrales qui souverainement va poursuivre son ascension solitaire… En 1933, Roosevelt démonétise les pièces d'or, institue la propriété de l'Etat sur l'or monétaire et soumet les sorties de lingots à l'autorisation du gouvernement fédéral. La même année, le professeur Bernard Moley, représentant personnel de Roosevelt, déclare de façon retentissante à la conférence monétaire internationale de Londres « Nous n'acceptons pas la tutelle de l'or, nous n'acceptons plus ce fétiche périmé. » Le 30 janvier 1934, le Gold Reserve Act rétablit la convertibilité de la monnaie, pour les échanges extérieurs, sur la base de 35 dollars l'once. Une valeur que le dollar surévalué, à mesure que se développera la création monétaire, conservera jusqu'au 17 mars 1968…
En 1935, les règlements internationaux en or sont partiellement rétablis.
La seconde guerre mondiale.
Avec la guerre, le désordre économique monétaire et financier s'est instauré, si toutefois l'ordre a jamais existé… L'Allemagne s'est installée dans l'autarcie. Elle tire de son territoire les matières premières de synthèse, le complément est réquisitionné dans les pays conquis, à charge d'indemnisation des producteurs par les trésors nationaux… Ses ressources financières et monétaires proviennent d'extravagantes pratiques : Manipulation des cours du mark[10], fixation autoritaire du taux de change dans les pays occupés (le mark à 20 francs !) ; Défaut de paiement des achats extérieurs par l'artifice des caisses de compensations à taux de conversion variable… ; Saisie de l'or des pays conquis - Autriche, Tchécoslovaquie, Belgique…- ; Spoliation des biens, des avoirs et de l'or des Juifs… ; Amputation des salaires par le contingentement et l'emprunt obligatoire… ; Travail forcé. La Banque des Règlements Internationaux[11] (BRI) de Bâle, sous la présidence de l'Américain Thomas Mac Kittrick, proche de Rockefeller, où siègent les représentants des Banques centrales d'Allemagne, de Belgique, de France, de Grande Bretagne (dont l'inévitable Montagu Norman), des Pays Bas, d'Italie, de Suède et du Japon, née en 1923, à l'occasion des Réparations, réalise les compensations financières entre les pays en guerre … L'Allemagne y dépose en contrepartie un or étrange venu de toutes les rapines et de tous les massacres…
Les Etats-Unis, arsenal des démocraties, comme les a institués Roosevelt sont le premier exportateur mondial. Au titre du prêt-bail de 1941, l'Amérique vend au monde libre (Angleterre, URSS, Chine, Nouvelle Zélande…) matériels de guerre, de transport, machines agricoles, matériels ferroviaires, usines clés en mains…, denrées alimentaires… payés cash « sur le quai d'embarquement » en or ou en dollars et emportés aux risques et périls des importateurs : « carry »... La Russie soviétique paye en or, l'Angleterre qui n'a pas soldé ses emprunts de 1918 est également contrainte à des versements métalliques.. Les autres pays empruntent aux banques américaines.
La conférence financière et monétaire des Nations Unies de Bretton Woods
Dès 1944, alors que la victoire se dessine, que l'Europe se libère, et qu'il faut reconstruire, il apparaît urgent d'instituer un ordre financier et monétaire. Seuls les Etats-Unis sont capables de s'atteler à la tâche… Lorsque les délégués de 44 nations se réunissent à Bretton Woods en juillet, trois objectifs ont été assignés : la libre conversion des monnaies, l'offre de crédits aux pays dont la balance des paiements est déficitaire, la stabilité des changes. Les trois quarts de l'or du monde ( 26 milliards de dollars d'or pour 8 milliards de dollars dans le reste du monde) ont alors afflué dans les caisses de la réserve fédérale. La monnaie américaine assise sur la puissance financière, politique, militaire, industrielle et commerciale du pays est devenue la référence mondiale.
Le dollar, sacré à Bretton Woods, autour duquel sont satellisées les autres monnaies[12] dans les limites d'une marge de fluctuation de 1%, est installé à l'égal de l'or dans les réserves des banques centrales, conséquence de l'accord de Gênes demeuré en vigueur. L'or demeure monnaie de règlement. Les dollars détenus par les banques centrales peuvent être présentés, à tout moment, et par quiconque, au remboursement, au taux de 35 dollars l'once. Les Etats-Unis demeurent d'ailleurs les seuls en mesure de vendre de l'or contre monnaie nationale. Dans l'esprit des négociateurs de Bretton Woods le système était immunisé contre les risques d'inflation du dollar, c'est à dire d'accumulation de cette monnaie hors des Etats-Unis. Les demandes de remboursement des billets réputés inflationnistes devaient avoir un effet régulateur. C'était la base du système et s'inscrivait dans son nom même : l'étalon de change or dont la pratique avait été funeste à la livre et au monde, en 1931. On prétendait cependant maintenir l'étalon de change or à travers une monnaie papier réputée stable et forte, le dollar.
Le Fonds Monétaire International, nouvellement institué, reçoit pour mission de stabiliser les échanges internationaux et la Banque internationale pour la reconstruction et le développement ou Banque mondiale, consent au monde en reconstruction des prêts remboursables indifféremment en or ou en dollars. Une monnaie papier dont la loi américaine autorise l'émission[13] jusqu'à quatre fois l'encaisse métallique fédérale. Au revers du billet vert, le sceau des Etats-Unis entouré de la devise apparue en 1935 : « Annuit cœptis Novus Ordo Saeculorum » : « Nouvel Ordre du Monde sois favorable à l'Entreprise… »
Les monnaies devant rester fixes par rapport à l'or, les Etats devaient s'engager auprès du Fonds monétaire à rendre leurs monnaies convertibles entre elles, selon l'art VIII de la charte du fonds qui ne put être accepté par les Européens qu'au début des années 60. Le Fonds monétaire était en conséquence organisé comme une sorte de banque auprès de laquelle les Etats pouvaient souscrire un nombre limité de « reconnaissances des dettes » pour obtenir des dollars. Ces prêts devaient être remboursés soit en or soit en dollars..
Mais telle est la confiance accordée à la puissance victorieuse que les Etats conservent des dollars dans leurs réserves et prennent l'habitude de payer avec ce papier. Les Etats-Unis devaient profiter du système pour encourager sinon contraindre leurs créanciers à conserver les dollars sans jamais en demander le remboursement. Le mécanisme des Euro dollars était en marche. Une partie de ces dollars font retour à New York sous forme de dépôts bancaires ou de bons du trésor américain. Le pays d'origine retrouve ainsi les disponibilités qu'il venait de perdre, entretenant « le déficit sans pleurs. » Ce dispositif sera générateur de l'endettement des Etats-Unis et d'inflation dans les pays créanciers qui augmentent leur propre émission monétaire sur la base des créances dollars.
Jacques Rueff écrit : « Ce qui a fait faillite c'est le régime résultant de l'addition au système parfaitement rationnel de Bretton Woods, d'une pratique qui lui était totalement étrangère : celle de l'étalon de change or, seule responsable de l'attribution du statut de monnaie de réserve au dollar des Etats-Unis. Cette règle a constitué au flanc du régime de Bretton Woods un véritable cancer, qui l'a miné jusqu'à entraîner sa totale destruction. »
Dans les années 1960, investissements américains à l'étranger, aides au développement, dépenses militaires dont la guerre du Viet Nam, transforment l'excédent commercial américain en déficit entraînant une dégradation de la confiance dans le dollar si ce n'est dans la politique américaine. La spéculation s'oriente vers le mark contre le dollar. Progressivement certains créanciers demandent le remboursement des dollars qu'ils détiennent et le stock d'or américain commence à baisser. Le 10 avril 1962, les pays à parité fixe s'engagent à acheter des dollars sans pouvoir en obtenir le remboursement en or ou devises étrangères. La réserve d'or américaine passe des 26 milliards de dollars de 1944 à 10,9 milliards de dollars en 1971. Le déficit cumulé 1958-1971 atteint 60 milliards de dollars.
La fin du Système de Bretton Woods
En mars 1968, une réunion internationale tumultueuse met fin à la possibilité pour les détenteurs privés de se procurer de l'or en échange de dollars. Jacques Rueff écrit : « C'est un véritable état d'insolvabilité monétaire que constata le 17 mars 1968, la décision de suspendre la libre convertibilité du dollar. Certes les Etats-Unis demeuraient le pays économiquement le plus puissant et industriellement le mieux organisé d'Occident. Mais ce n'est pas avec des usines que l'on assure la convertibilité d'une monnaie, c'est avec des devises étrangères et de l'or. Et des unes comme des autres la république américaine, malgré son prestige et son incomparable richesse était entièrement dépourvue. »
En 1969 la quantité d'or et de dollars disponibles apparaît insuffisante pour supporter l'expansion du commerce mondial. Les droits de tirage spéciaux sont alors institués par le FMI. dans la logique instituée à Bretton Woods. La valeur du DTS était alors fixée à 0,888671g. d'or fin soit la valeur du dollar. Mais si les DTS ont la valeur du dollar, ils ne sont pas pour autant une monnaie. Après 1973 la valeur du DTS sera détachée du dollar et fondée sur un panier de monnaies.
Le 15 août 1971, la masse des dollars en circulation hors des Etats-Unis est devenue telle qu'après trois mois de troubles sur le marché des changes, le dollar est déclaré inconvertible. En fin d'année les accords du Smithsonian Institute tentent d'établir une nouvelle parité des monnaies autour du dollar légèrement dévalué (7,9%, soit 38 dollars l'once.) En juin 1972, sous les assauts de la spéculation, la livre devient flottante.
En 1976 les accords de la Jamaïque instituent le flottement général des monnaies dont les taux de change sont désormais fixés par confrontation de l'offre et de la demande sur le marché des changes. L'or[14] est démonétisé et son cours devient celui d'un simple métal précieux… Mais les taux de change flottants ne permettront ni d'équilibrer les échanges internationaux, ni de stabiliser le système monétaire international, ni d'apporter une autonomie à la politique économique de chaque pays, ni d'empêcher la spéculation… Les prix internationaux, en particulier ceux des matières premières, demeurent exprimés en dollars, une monnaie évolutive et comme l'écrit Jacques Rueff : « La liberté du commerce ne sera qu'un vain mot tant que ne sera pas assuré l'équilibre des monnaies qui le véhiculent. »
Le système de l'étalon de change or était mort et le boulet de la dette internationale des Etats-Unis continuait sa ronde inflationniste : de 7 milliards de dollars en 1945 elle passe à 80 milliards au 31.12.72
Philippe Renoux
novembre 2008
[1]Montagu Norman demeura 24 ans, de 1920 à 1944, à la tête de la Banque d'Angleterre, poste auquel il présida à la liquidation de la suprématie globale de la Grande Bretagne. Selon un de ses biographes : « Norman était un homme étrange dont le profil mental relevait d'une paranoïa contrôlée. Il n'avait rien à faire des gouvernements et redoutait la démocratie. Tous deux lui apparaissaient constituer une menace pour le système bancaire, et en conséquence contraires au bien de l'humanité… Intraitable, infatigable, impitoyable, il concevait sa vie comme une lutte clandestine contre les forces de la monnaie sauvage liguées avec l'anarchie et le communisme. Il fit de la banque centrale britannique une forteresse prête à affronter une révolte populaire, avec la réserve de l'or sacré enfouie dans des chambres fortes sous le niveau des eaux souterraines, prête à être engloutie par une commande placée sur son bureau. Il passait le plus clair de son temps à parcourir le monde sur des vapeurs rapides, le plus souvent incognito, dissimulé sous un large chapeau noir et sous le nom d'emprunt de « professeur Skinner. » Ses embarquements par les accès réservés au fret passaient aussi inaperçus que ceux de Greta Garbo durant les mêmes années et reflétaient la recherche obstinée du secret. Norman avait un dévoué collègue en la personne de Benjamin Strong. Celui-ci devait sa carrière à JP Morgan qui le nomma secrétaire de la Bankers Trust Company de New York, en 1904 et en fit son agent d'exécution dans l'arrangement qui suivit le crack de 1907… Vice-président de Bankers Trust en 1909, il fut coopté par Morgan et Kuhn & Loeb Company à la tête de la Réserve Fédérale, en 1914. Strong rencontra Norman deux ans plus tard et tous deux scellèrent leur coopération sur les pratiques bancaires qu'ils révéraient. Ils se rencontraient souvent et passaient leurs vacances dans le midi de la France. »
[2] Présidé par lord Cunlife ancien gouverneur de la Banque d'Angleterre et représentant de Lloyd George à la Conférence de la paix. Il traita notamment la question des réparations.
[3] Réunissant sur l'initiative de Paul Warburg et de son frère Max les principales banques d'Europe et des Etats Unis.
[4] « Rien ne doit être si exempt de variation que ce qui est la mesure commune de tout » Montesquieu.
[5] Occupation de la Ruhr par les troupes franco-belges, entraînant une nouvelle chute du mark.
[6]Le paiement de la tranche conditionnelle des réparations est subordonné à l'existence d'un excédent budgétaire et une balance des paiements positive.
[7] La £ vaut 305 marks en août 1921, 1020 marks en novembre 1921, 8.000 marks en janvier 1923, 20 millions de marks en août 1923, 20 milliards de marks en décembre 1923.
[8] Traités d'Ottawa - août 1932.
[9] Special custom duties de novembre 1931 et general tariff de février 1932.
[10] Il en existera 147…
[11] La fermeture de la BRI coupable de collaboration, sera prescrite lors de la conférence de Bretton Woods… En fait cette prescription ne sera pas exécutée et la BRI poursuivra son activité sous l'égide de l'OCDE…
[12] Selon une « parité (pour chaque monnaie) exprimée en termes d'or ou en dollar des Etats-Unis du poids et du titre en vigueur au 1er juillet 1944 »
[13] Le plan Marshall qui servit à relancer l'économie américaine au sortir de la guerre fut notamment financé par la création monétaire…
[14] L'or est utilisé aujourd'hui, pour 80% de la production, par la bijouterie. Son prix ne cesse d'augmenter. Pour 100 dollars en 1973, il est aujourd'hui voisin de 700 dollars l'once. Il demeure toutefois dans les réserves des banques centrales à titre de valeur.. refuge.