dimanche 7 février 2010

The Social Network, où quand la Silicon Valley décroche Hollywood.

Le nouvel Economiste du 10 décembre 2009 — N°1501 – © Nouvel Economiste 2009

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L'Internet pour solliciter les foules en temps réel.
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E-réputation - Good buzz contre bad buzz
Influencer ce qui se dit sur le net. En toute transparence.
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Cybercriminalité - Cheval de Troie
Les réseaux sociaux, une véritable invitation à entrer dans les systèmes d'information des entreprises.
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Etudes et sondages - Une mine d'information
L'écoute attentive du web 2.0 ouvre la porte à un nouveau dialogue avec le consommateur.
LNE du 23 avril 2009 - N°1473

Identité 2.0
"Facebook Connect", pour s'affranchir des corvées d'inscription sur les sites.
LNE du 29 janvier 2009 - n° 1461


Facebook

Un phénomène qui ne peut pas laisser les entreprises insensibles.

Sans doute un phénomène, peut-être une révolution. A l'instar d'un Google dans la recherche sur Internet, Facebook est en train de bouleverser la communication sur Internet.

Née d'une idée toute simple — un trombinoscope sur le Web où chacun peut y retrouver ses amis —, la plate-forme est devenue en 5 ans le leader toutes catégories des réseaux sociaux. Fort de 350 millions d'utilisateurs dans le monde — 13millions en France — le site est désormais l'un des principaux carrefours d'audience de la Toile. Aucune organisation ne peut rester insensible ou ignorer l'outil, à commencer par les entreprises et les marques. Vecteur de promotion d'une image ou d'un produit, apporteur de notoriété ou de trafic Internet, mais aussi nouveau canal de la relation, voire de recrutement, Facebook joue sur plusieurs registres. A condition de définir sa stratégie. Et ce n'est que le début : le "social networking" pourrait bien présager d'une nouvelle forme d'organisation dans les entreprises.

Par Edouard Laugier

The Social Network, où quand la Silicon Valley décroche Hollywood. Fin 2010 sortira sur grand écran un long-métrage consacré à Facebook. Le film qui a coûté 40 millions de dollars, raconte l'incroyable parcours des fondateurs d'une start-up née dans une chambre d'étudiants ! En tout juste 5 ans, Facebook est devenu le leader toutes catégories des réseaux sociaux. "C'est le réseau des réseaux. De par son audience, c'est un média de masse. Il est unique et incomparable", constate Jérôme Wallut, patron du pôle interactif de l'agence W&Cie. 

Le site comptait déjà 200 millions d'utilisateurs en avril dernier et a récemment annoncé avoir franchi la barre des 350 millions d'utilisateurs actifs (dont 13 millions en France). Si Facebook était un pays, il serait le 3e Etat le plus peuplé au monde devant les Etats-Unis ! Les chiffres de la société californienne (voir encadré) défient les lois de la gravité. Nombre d'utilisateurs donc mais aussi fréquence des visites (50 % des utilisateurs viennent tous les jours), temps passé (55 minutes en moyenne) et bien sûr valorisation financière estimée à 10 milliards de dollars témoignent d'un fantastique succès d'audience. Dès lors, Facebook règne en maître dans l'univers des réseaux sociaux : il concentre désormais plus de la moitié des audiences de tous les sites de socialisation réunis, selon les chiffres de l'institut d'études Experian Hitwise. Facebook génére 58 % de l'audience des réseaux sociaux contre seulement 30 % pour MySpace. Comment expliquer un tel tsunami ? Après tout, le "social networking", la possibilité de relier des personnes entre elles, n'est pas vraiment nouvelle. Friendster, Bebo ou encore Myspace sont arrivés sur ce créneau bien avant Facebook. 
Le succès du réseau repose tout d'abord sur la simplicité du service. Si le site a connu une croissance massive ces deux dernières années, c'est grâce à la nature extrêmement simple de l'interface. Il suffit de quelques clics pour créer sa page. Pas besoin d'être un pro du Web pour débuter. "La base reste la fonction trombinoscope (NDLR : Facebook en anglais). Je crée une page. Je dis qui je suis, d'où je viens, ce que je fais et je publie une photo", énumère Jérôme Delaveau, le directeur général de Human to Human, agence de veille d'opinion en ligne. Si Facebook atteint ces sommets, c'est aussi grâce à ses larges fonctionnalités qui en font un peu le "tout en un" des usages favoris des internautes. On s'y crée une page personnelle comme sur MySpace, on y envoie des e-mails comme sur Gmail, on publie des photos ou des vidéos comme sur Youtube, on télécharge des applications, on crée des débats, on s'exprime dans des groupes comme sur les forums de discussion Internet, on dit ce qu'on fait, les fameux statuts, comme sur Twitter. 
Tom Smith, directeur général du cabinet de conseil Trendstream spécialisé dans les réseaux sociaux, tranche : "La force de Facebook réside dans la puissance de sa dynamique sociale." En effet, le site plaît parce qu'il sert à rechercher, à inviter et à contacter des personnes. "A la différence des autres réseaux, Facebook offre une véritable expérience sociale", ajoute Tom Smith. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le tout premier acte de la plate-forme est de suggérer des amis. Mieux, au nouvel arrivant le site de socialisation en proposera même un certain nombre. Ces "amis" sont sélectionnés en fonction des informations saisies lors de l'inscription : lycée fréquenté, formation effectuée, emploi occupé et bien d'autres critères encore, en particulier les centres d'intérêt de l'utilisateur. Dès lors la machine est lancée et ne s'arrêtera plus : les amis de mes amis ne sont-ils pas mes amis ? Selon une étude menée en juin dernier par Ligthspeed Research, le premier usage toutes catégories de Facebook est d'ailleurs de garder le contact avec ses amis, juste devant l'occupation du temps libre et le fait de tenir au courant ses amis de ce que l'on fait. La création de réseau est facilitée par la possibilité de rechercher un nom, une fonction, une entreprise, des centres d'intérêt. Fin août dernier, Facebook a annoncé une nouvelle version de son moteur de recherche. Plus efficace, il permet de chercher parmi les statuts, photos, liens, vidéos et notes partagés. Une fois le contact trouvé, la demande de mise en relation est simplifiée à l'extrême : il suffit d'un clic ou deux. Idem pour le partage de passions. "Facebook est surtout un média d'appartenance ou de badge. On y dit qui on est, ce qu'on aime et ce qu'on n'aime pas", note Jérôme Delaveau. Il y en a pour tous les goûts. Des très sérieux dans l'univers des affaires publiques ou dans celui des entreprises mais aussi et surtout des groupes beaucoup plus légers et potaches où l'on se "poke" (acte d'attirer l'attention d'une personne en lui tapotant sur l'épaule). "Les groupes servent de plus en plus d'outil de guérilla numérique, poursuit Axel Dreyfus, PDG de la société de sauvegarde de données en ligne Axalot. Par exemple, le nombre de groupes anti-SNCF ou anti-Sarkozy est incroyablement important." (NDLR : respectivement plus de 60 et de 200 !) Dernier usage en vogue sur Facebook : "La pratique du "status updating" : les internautes s'en servent pour broadcaster au monde entier ce qu'ils sont en train de faire", observe Clément Thibault, consultant chez Novedia Consulting. A ce jour, les utilisateurs surfent en moyenne chaque jour près d'une heure sur la plate-forme, ce qui fait du site l'un des carrefours d'audience les plus importants en terme de temps passé sur la Toile. Au fil du temps, le site est aussi devenu la plus grosse plate-forme de partage de photos dans le monde. Chaque jour, 11 millions de photos y sont publiées. Facebook, nouvelle icône de "l'égologie", selon le concept du prospectiviste Joël de Rosnay ? Il est vrai qu'avec les réseaux sociaux, le moi est au centre. "Mark Zuckerberg, le principal fondateur du site, a toujours possédé une vision inspirée de l'Internet, estime Clément Thibault. Pour lui, le Web n'est pas une affaire de réseaux ou de machines, ni même de contenus. Le Web, c'est les gens : des personnes reliées entre elles, le "graph social" comme ils disent en interne chez Facebook. Cette vision "des échanges authentiques entre utilisateurs réels", proposée dès février 2004, fait la force et la puissance de l'entreprise aujourd'hui", conclut le consultant de chez Novedia.

Un nouveau canal de communication

Dès lors, pas question pour les entreprises de ne pas se pencher sur le sujet. En quoi les entreprises et les marques peuvent-elles en profiter ?
Les bonnes raisons ne manquent pas. Comme sur tout média de masse, on y communique. "Facebook est un nouveau point de contact. Les entreprises vont sur ce réseau pour tout d'abord faire de la communication", estime Jérôme Delaveau. A la différence de Twitter dont l'enjeu est de créer de la relation de proximité, sur Facebook, les entreprises cherchent à entretenir des communautés d'affinités. L'idée ? Faire d'une pierre deux coups grâce aux effets communautaires bien connus des médias sociaux sur Internet : l'entreprise dialogue avec ses clients et fait en sorte que ses clients dialoguent entre eux sur l'entreprise. CQFD. "La quête du Graal sur Facebook est de transformer les contacts en ambassadeurs de la marque sur le réseau et en dehors", révèle Pascal Malotti, consultant pour la société de conseil en technologies Valtech. Cette viralité propre au social networking a été identifiée. De nombreuses organisations utilisent Facebook pour rechercher de la notoriété, afficher de la visibilité et créer du lien. La tendance est d'autant plus forte que le temps passé sur un réseau social rend l'outil bien plus efficace et rapide que les systèmes d'échange plus traditionnels comme le courrier électronique. C'est un des grandes tendances du moment : les réseaux sociaux ringardisent l'e-mail dont l'usage est en perte de vitesse. En effet. Selon une étude de AddToAny, Facebook génère près d'un quart des contenus échangés sur Internet contre seulement 11 % pour l'e-mail. Une société comme Coca-Cola, qui possède 4 millions d'amis sur sa page, touche à chaque message qu'elle poste un nombre de personnes inaccessibles via un e-mailing classique. Pourquoi se priver d'y aller ? Il semblerait que toutes les entreprises ont intérêt à étudier cet incroyable levier. "Facebook est le centre de gravité des réseaux sociaux. Si une marque veut être présente sur ce type de canal, c'est celui-ci qu'elle doit choisir", ajoute Pascal Malotti.

De nouvelles communautés d'expression

Comment bien exploiter le réseau des réseaux ? Quelles sont les bonnes pratiques ? 
Concrètement, les entreprises ont à leur disposition plusieurs outils, au nombre de quatre : la page, le groupe, l'événement et les applications. Cédric Dujour, président de l'agence interactive SecondWeb spécialisée dans le communautaire, témoigne : "La première chose à faire est de créer une page qu'il conviendra d'animer. Facebook propose une palette de possibilités : publication de contenus classiques comme de l'écrit et de l'audiovisuel mais aussi applications plus interactives tels des quizz ou des sondages qui génèrent du trafic." Ce n'est pas tout. Pour être vraiment efficace la présence sur le réseau doit intégrer la dimension interactive avec les utilisateurs. Agence interactive pour le compte de Chevignon, SecondWeb a décidé de créer des groupes pour amorcer le dialogue. Concrètement, un groupe "doudoune" voit le jour. L'intérêt ? Profiter du mode d'expression que constituent les groupes et engager des conversations via un sujet autour de la marque. La marque peut décider de constituer des groupes d'utilisateurs par produit, par pays, par centre d'intérêt... ajoute Clément Thibault. Mais l'une des clés est de décliner des services légitimes et à valeur ajoutée, autour des univers des marques. C'est par exemple le cas de l'équipementier Reebook avec le fitness. La marque est légitime pour en parler" Les univers communautaires des groupes ouvrent de nouveaux territoires d'expression pour les entreprises. Les sujets peuvent être très variés. Et même surprenants. L'un des groupes les plus actifs de l'opérateur télécom américain ATT porte sur... le golf. Il est animé par un expert de ce sport qui travaille dans l'entreprise. "C'est une très bonne stratégie, estime Jérôme Wallut de W&Cie: ATT parle d'elle sans vraiment le faire. C'est malin et surtout beaucoup moins dangereux d'engager la conversation sur le golf que sur soi." Bien sûr, Facebook est plus facile à travailler pour les marques icôniques. Autre illustration récente : Ikea. A l'occasion de l'ouverture d'un nouveau magasin en Suède, le groupe a mis en place un concours sur Facebook : 12 photos d'exemples d'agencement ont été mises en ligne sur le profil du manager du magasin, créé pour l'occasion. Les premières personnes à associer leur nom à un produit sélectionné sur l'image, "tagguer" dans le jargon Facebook, se voyaient offrir l'objet. Le buzz a été énorme, le consommateur devenant acteur de la campagne. 
"La principale difficulté pour une entreprise étant d'attirer les gens vers sa communauté. L'enjeu est de trouver des angles pertinents. Il faut un levier de départ original. Les entreprises doivent penser client en se demandant ce qui les intéresse", explique Jérôme Delaveau de Human to Human.

Publicité : du R.O.I au S.O.I.

Sur Facebook aussi la publicité est un moyen d'attirer le chaland. Le site commercialise non seulement l'espace sur ses milliards de pages, il met aussi à disposition des internautes des outils pour concevoir et piloter ses campagnes. Tout se passe en ligne. Une publicité est un moyen pour une entreprise ou une marque de promouvoir un produit ou service sur le réseau social. Elle peut comporter un lien vers une page ou une application Facebook, ou vers un site Web extérieur. Un système de ciblage est également disponible. "Les outils de targeting mis à disposition sont très puissants. Ils permettent de cibler la campagne en fonction de critères comme bien sûr l'âge ou le sexe mais aussi la formation, la situation amoureuse voire la date de naissance. On ne peut adresser que les personnes dont c'est l'anniversaire !", témoigne Axel Dreyfus, de la société Axalot. Facebook facture aussi bien au coût par clic (CPC) qu'au coût pour mille impressions (CPM). Mener des campagnes pour attirer les utilisateurs sur sa page ou vers des groupes pourrait bien devenir un investissement majeur des entreprises dans leur stratégie digitale. Les experts parlent de "social média optimization". C'est important d'autant que depuis quelques mois, Google référence les contenus du réseau social. Générer du trafic sur Facebook, c'est aussi améliorer son référencement naturel sur les moteurs. Pour Pascal Malotti du cabinet de conseil Valtech, "les entreprises ne doivent pas toutefois être dans une simple logique de retour sur investissement. Ce qui compte c'est la "sphere of influence" comme l'ont conceptualisée les Américains. Sur les médias sociaux, le SOI remplace le ROI", explique le consultant. Les indicateurs de rentabilité sont la viralité des messages, les commentaires et les discussions engagées, les recommandations, les "i-like this", la valeur d'une action s'analysera en influence sociale."

Parler de soi et divertir, antinomiques avec la logique d'entreprise

"Etre efficace sur Facebook, c'est avant tout réfléchir à apporter des contenus à valeur ajoutée", précise Clément Thibault. Beaucoup y vont sans réellement savoir quoi raconter. Tout d'abord, ont-elles vraiment leur place sur Facebook ? C'est complexe car les entreprises ne sont pas des personnes, or le réseau social de Mark Zuckerberg a d'abord été créé à destination des individus. "Le phénomène est multidimensionnel. Les utilisateurs se servent surtout de ce réseau pour parler de soi et pour s'amuser et se divertir. Par nature, ces deux dimensions n'entrent pas dans la logique des entreprises", explique Serge Perez, fondateur de l'agence de communication corporate les Ateliers Corporate. Dès lors, le problème est que l'entreprise est logée à la même enseigne que l'utilisateur. Le social networking est très nouveau. Son adoption dépend de la capacité d'absorption de l'organisation. "Le principal frein est à mon sens psychologique : aller sur Facebook implique de ne pas contrôler à 100 % sa communication", estime Pascal Malotti, de Valtech. Ouvrir une page est simple et gratuit. Deux minutes suffisent, mais attention le plus dur commence. Facebook est un défi en matière de communication d'entreprise. "Généralement, les sociétés ont une approche en silo de l'outil. Le plus souvent cette stratégie est confiée à un collaborateur isolé disposant de très peu de ressources", observe Jérôme Delaveau. La formation et la responsabilisation de compétence en interne semble plus que jamais indispensable. Quand un réseau social devient une stratégie d'entreprise, c'est par exemple 6 postes à temps plein de community manager chez Starbucks. Ils sont là pour animer les pages et les groupes de la société mais aussi pour pousser les usages en interne.

Le "la" des organisations de demain ?

Le réseau social n'affecte pas uniquement les domaines de la communication et du marketing. "Il aide de plus en plus à la qualification digitale des candidats", constate Clément Thibault de Novedia Consulting. En effet. Une étude réalisée en juin dernier par le site américain d'annonces de recrutement CareerBuilder.com révèle que désormais 45 % des employeurs outre-Atlantique examinent les pages des candidats ouvertes sur les réseaux sociaux. Le bouleversement de la société lié à Facebook est en train de toucher l'entreprise dans son organisation même. "Les collaborateurs veulent eux aussi des annuaires intelligents, des fonctionnalités d'échanges et de mises à jour des statuts similaires à Facebook", constate Dominique Turcq, président-fondateur de la société de conseil Boostzone institut, et spécialiste des réseaux sociaux. En interne, les effets induits sont légion. Les entreprises veulent le copier et faire leur propre Facebook dans l'entreprise. Les promesses ? Gains de productivité, rapidité et innovation d'un communication plus directe et instantanée. Pour Dominique Turcq, "le grand avantage de Facebook est qu'il a fait comprendre les réseaux sociaux à tout le monde. Là où le knowledge management a échoué, les réseaux sociaux gagnent car la masse et la vitesse d'information ont changé". Ce nouveau paradigme de la communication interne n'est pas sans poser de problèmes : la faible implication des DRH et des DSI est un sujet majeur. "Tant en ce qui concerne l'usage de réseaux sociaux en externe, Facebook par exemple mais aussi Twitter, que celui de réseaux sociaux internes, c'est une question des systèmes de gouvernance promouvant les mises en garde et la discipline personnelle", estime Dominique Turcq. 
Les entreprises ont mis du temps à percevoir le phénomène. Aujourd'hui elles sont bien obligées de constater qu'une part de plus en plus importante de leurs collaborateurs s'en servent, en particulier les plus jeunes. C'est le cas des fameux "digital natives", également désignés sous l'appellation de génération Y. "Facebook est un révélateur de l'intelligence collective des organisations. Ce qui est important est qu'il challenge la manière dont les entreprises sont organisées, estime Serge Perez des Ateliers Corporate. Avec les réseaux sociaux elles passent d'une logique de communication top-down à une communication horizontale." Et si Facebook donnait le "la" des organisations de demain ?


Modèle économique
Facebook en quête de monétisation

Les Cassandre des réseaux sociaux sont prévenus : Facebook peut gagner de l'argent ! A en croire Mark Zuckerberg, le site est même rentable depuis septembre dernier. Aucun chiffre n'est public. Dans un message posté sur sa page, le fondateur du site garantissait un "cash flow positif" au trimestre dernier. Les actionnaires apprécieront, en particulier le holding Internet russe DST Global, dernier actionnaire entrant à hauteur de 1,96 % du capital pour 200 millions de dollars. Facebook est ainsi valorisé 10 milliards de dollars. De nombreux investisseurs ont injecté des millions de dollars dans le site en particulier Microsoft (240 millions de dollars) mais aussi plusieurs fonds d'investissements professionnels californiens. Bien sûr il y a déjà eu une bulle, mais à ce niveau les investisseurs prennent toujours des risques calculer. Reste à Facebook transformer son audience en or... vert. Une IPO n'est pas à l'ordre du jour. En attendant, la plate-forme a encore de nombreux défis à relever. "Facebook est dans une situation compliquée. Le site n'a pas encore trouvé son modèle et sa taille commence à devenir un problème", analyse Tom Smith, directeur général du cabinet de conseil spécialiste des médias sociaux, Trendstream. Parmi les sujets qui fâchent : les dizaines de millions de comptes inactifs dont Facebook supporte les coûts d'hébergement de données ou de nombreux utilisateurs localisés dans des pays émergents qui n'intéressent pas les annonceurs. La publicité permettra-t-elle de procurer des revenus suffisants pour justifier la valeur du site ? D'autres sources de revenus devront peut-être être trouvées.   E.L.


Avis autorisé
"Réseaux sociaux dans l'entreprise, qu'est-ce qui coince ?"

Stéphane Roussel,
directeur des ressources humaines de Vivendi.

"Avec l'espace collaboratif, le manager n'a plus le même temps d'avance qu'auparavant"

Rien ne devrait coincer car les entreprises ont tout à gagner du phénomène des réseaux sociaux, autrement dit d'une communication plus ouverte, de la collaboration et des échanges via des plates-formes Internet. Plus brutalement, elles n'ont de toute manière pas vraiment le choix en raison de la nouvelle génération de collaborateurs qui arrive sur le marché du travail. Ces "digital natives" exigeront des outils de communication interne semblables à ceux qu'ils utilisent tous en externe comme par exemple Facebook. Dans la réalité, nous en sommes loin. Effectivement cela coince. Je constate un manque de maturité très important de nos grandes entreprises dans la mise en place de réseaux sociaux d'entreprise. Pour la plupart, elles en sont effectivement encore au stade de l'intranet non collaboratif. Plus ou moins consciemment, il existe des résistances dans les entreprises. Elles peuvent venir de plusieurs acteurs : des managers les plus seniors tout d'abord, lesquels ont peur de perdre la maîtrise de l'information, de devoir collaborer avec des personnes nouvelles et d'être "challengés" en terme de compétence. Avec l'espace collaboratif, le manager n'a plus le même temps d'avance qu'auparavant. Dans un tel espace, il est un acteur. Pour réussir, il doit avoir le sens de la proximité, tout en gardant son rôle de leader. Les réseaux sociaux bouleversent les modes de management et cassent les codes. Autres freins possibles : les partenaires sociaux. Ils peuvent être gênés en se sentant dépossédés de leur place d'intermédiaire entre les salariés et les dirigeants, ces derniers pouvant désormais entrer en contact via des réseaux sociaux, et pourquoi pas les collaborateurs eux-mêmes car il y en a toujours qui ne voudront pas s'investir dans l'outil. C'est compliqué parce que cela ne veut pas forcément dire qu'ils ne sont pas impliqués dans l'entreprise d'une autre manière. Au final, les réseaux sociaux demeurent un océan d'opportunités pour les entreprises. Elles doivent regarder les meilleures pratiques de ce qui se fait sur Internet notamment Facebook qui, sans devenir un outil interne, inspire fortement les innovations ergonomiques actuelles !


Le nouvel Economiste du 10 décembre 2009 — N°1501 – © Nouvel Economiste 2009

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