Le Colloque Orée : Biodiversité et climat avant et après Copenhague - Rencontres d'experts s'est déroulé jeudi 5 novembre après midi avec le soutien de : la Fédération Française des Sociétés d'Assurances; LVMH; La Société des Agriculteurs de France; Veolia Environnement et en partenariat avec : Valeurs Vertes, le magazine du développement durable ; Cyclope , Confrontations Europe et Euractiv.fr Jacques WEBER, économiste au CIRAD, chargé de l'élaboration du programme avec l'association Orée a sollicité des experts du changement climatique, de la biodiversité et des économistes de premier plan pour permettre aux participants de cerner les contours de ce que pourrait être le monde d'après Copenhague. Cette après midi de conférence fut l'occasion de faire passer auprès des 200 personnes qui composaient le public, des messages forts : 1. sur le caractère de Janus des évolutions du climat et de la biodiversité, 2. sur les conséquences potentielles d'un échec ou d'un succès de Copenhague, 3. sur les marges de manoeuvre, et les coûts associés. Danielle NOCHER, Fondatrice et Directrice de la publication de Valeurs Vertes, le magazine du développement durable animait les débats, avec son franc parlé et son dynamisme habituel. Ghislaine HIERSO, Présidente de Orée et Directrice des relations institutionnelles de Veolia Propreté a ouvert le colloque après avoir remercié les partenaires et rendu hommage à Hervé Morize, ancien président de la SAF, structure d'accueil du colloque ce jour là. Elle a souligné que les instances internationales, européennes et nationales n'ont pas assez pris en compte ces dernières années la question de l'érosion de la biodiversité, et rappelé les travaux du Groupe de travail Biodiversité et économie de Orée depuis 2006. Voir son discours Hervé LE TREUT, directeur de l'Institut Pierre-Simon Laplace , membre de l'Académie des Sciences et membre du GIEC, explique que le problème climatique constitue un problème d'échelle. Or les échelles temporelles du problème climatique sont mal comprises et donnent souvent lieu à des malentendus. Le climat de la planète, relativement stable depuis dix mille ans, a connu une rupture brutale amorcée avec la Révolution industrielle et fortement accentuée depuis la Seconde guerre mondiale. Notre monde a ainsi cessé, depuis les années 70 ou 80, d'être durable. En outre, les phénomènes tels que les « puits de carbone », qui atténuent l'effet visible aujourd'hui du changement climatique, annoncent une accélération supplémentaire de celui-ci au cours des décennies à venir, lorsqu'ils auront eux-mêmes disparu en raison des modifications du climat. L'un des principaux enjeux de la conférence de Copenhague consistera à réintégrer les Etats-Unis et la Chine (non signataires du protocole de Kyoto) dans l'effort international coordonné en vue de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les quatre rapports du GIEC font apparaître une grande stabilité des enseignements pouvant être tirés des modèles utilisés pour la prévision du changement climatique : ces études convergent pour indiquer qu'une augmentation de température de 2 à 6°C est probable d'ici la fin du siècle. Or de nombreuses études ont confirmé l'existence d'un seuil de danger, établi à 2°C : si l'évolution de la température moyenne du globe était supérieure à ce niveau, le système se modifierait et évoluerait de façon moins contrôlable. Cette conclusion a considérablement rapproché les échelles de temps de l'action : la limitation à moins de 2°C du réchauffement climatique impose d'agir dès les prochaines années, et en tout cas avant 2050, date après laquelle il sera trop tard. Dans le même temps, l'attente accroît les problèmes d'adaptation et risque d'écarter les positions des différents pays. Les années qui viennent sont donc des années clés pour la prise de décisions sur ces sujets. Voir sa présentation
Sylvie JOUSSAUME, chercheur au CNRS et au sein de l'Institut Pierre-Simon Laplace, rappelle que la température moyenne ne constitue qu'un des éléments du changement climatique : les caractéristiques (fréquence, intensité) des événements climatiques extrêmes seront également modifiées. La probabilité de vagues de chaleur est ainsi appelée à augmenter, y compris dans des pays comme la France, de même que leur intensité. Par ailleurs, l'augmentation des pluies s'accompagnerait d'une diminution de la disponibilité en eau dans des régions déjà relativement sèches et d'une augmentation des phénomènes violents tels que les pluies torrentielles, dont la fréquence connaît déjà une augmentation sensible. De la même façon, si la fréquence des cyclones ne devrait pas varier de façon significative, leur intensité devrait augmenter sensiblement, comme on peut déjà l'observer dans l'Atlantique Nord. L'augmentation du niveau de la mer, qui devrait être comprise entre 18 et 59 cm en 2100, se poursuivra au-delà de cette date. Elle est associée à plusieurs risques (surcote régulière, érosion côtière, salinisation) dont on observe déjà la matérialisation à Tuvalu, dans le Pacifique, où un plan de migration de la population est en cours de mise en oeuvre, compte tenu de l'invasion de plus en plus fréquente de la terre par la mer. Sur le plan sanitaire, les incertitudes sont plus grandes encore qu'en ce qui concerne les impacts sur les écosystèmes. Le climat peut affecter la santé de façon directe (risques cardiovasculaires, respiratoires, etc.) mais aussi de façon indirecte : une modification de la quantité d'eau sur terre, par exemple, peut dégrader la qualité de l'eau et poser différents problèmes sanitaires. La modification des écosystèmes ou du niveau de température pourrait aussi entraîner une recrudescence d'un certain nombre de maladies, comme la dengue dans les zones tropicales. Sur le plan économique, des travaux montrent que la perte de PIB serait d'autant plus grande que la fréquence et l'intensité des événements extrêmes seraient élevées. Ils montrent aussi que les pays ayant une forte capacité à investir pourraient endiguer ces effets économiques, tandis que ceux qui n'ont pas cette capacité risquent d'être touchés de façon plus profonde. Nous faisons donc face à deux enjeux : un enjeu d'atténuation (mitigation), afin de limiter l'ampleur des changements climatiques. un enjeu d'adaptation, afin de réduire la vulnérabilité de la planète au changement climatique. L'objectif d'atténuation impose de stabiliser la concentration de l'atmosphère en gaz carbonique. Pour cela, nous n'avons d'autre choix que d'agir dès aujourd'hui en réduisant les émissions globales de CO2 par un facteur quatre. Par ailleurs, l'objectif d'adaptation suppose d'introduire la dimension « climat » dans tous nos choix. Une prise de conscience est donc indispensable, de même que le développement des connaissances et la mise en place de systèmes efficaces de suivi et d'alerte. Au terme de cette présentation se dessine une boucle d'interaction entre le système social, le climat et le changement climatique. Le défi qui nous est posé consiste à déterminer comment nous pourrons assurer le développement futur de ce système intégré, face aux changements globaux. La prise en compte de cet enjeu a une incidence sur les négociations de Copenhague : la quantité de carbone que l'on peut encore émettre, dans la perspective d'une stabilisation, est encore plus faible que celle qui est estimée si l'on ne tient pas compte de cette rétroaction entre le climat et le carbone.
Voir sa présentation Christian de PERTHUIS, professeur associé à l'université Paris IX Dauphine, souligne que deux tiers environ des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent de la façon dont nous produisons et utilisons l'énergie. Un tiers de ces émissions provient du système agro-forestier. Or si la production et l'utilisation d'énergie donnent lieu à la mise en place d'instruments économiques efficaces, nous en sommes encore loin concernant le système agro-forestier. L'efficacité de l'action contre les gaz à effet de serre dépendra de la capacité des sociétés humaines à mettre en place des instruments limitant l'usage gratuit et illimité qui est fait de l'atmosphère. Le protocole de Kyoto constitue un premier pas dans cette direction. Il présente cependant deux limites importantes. La première tient à l'insuffisance des engagements qui ont été pris (les Etats-Unis et la Chine, notamment, ayant refusé de le ratifier). La seconde découle d'une difficulté nouvelle : le partage de la « rente carbone » générée par le plafonnement des émissions. Or il n'en est nullement question dans les débats jusqu'à présent. La conférence de Copenhague n'a pas pour objectif de déterminer si les principaux pays sont décidés à agir pour endiguer le changement climatique : il s'agit de déterminer si les politiques contre le changement climatique seront organisées dans le cadre multilatéral des Nations Unies. Certains experts considèrent qu'il serait plus efficace que cette coordination n'existe pas. Christian de PERTHUIS fait part d'un avis différent : en l'absence d'accord à Copenhague, les pays en développement, c'est-à-dire 80 % des Etats de la planète, risquent d'être exclus de la discussion. Les pays émergents sont aujourd'hui dans une situation très confortable dans laquelle l'application du principe de « responsabilité partagée mais différenciée » les a placés. La conférence de Copenhague pourra être considérée comme un succès si elle donne naissance à un dispositif prenant le relais du protocole de Kyoto mais plus efficace que celui-ci, ce qui suppose de : élargir les engagements (aux pays émergents, notamment, avec lesquels un échange ne pourra s'instaurer que si les Etats-Unis commencent par entrer dans le dispositif) ; mettre en place des transferts économiques et financiers, en utilisant la « rente carbone » ; intégrer l'agriculture et la forêt ; intégrer les questions d'adaptation, longtemps reléguées au second plan : il s'agit d'identifier les mécanismes économiques et financiers à mettre en place au niveau international afin de financer des études et des méthodes permettant d'adapter les pays les plus vulnérables au changement climatique. Comme l'explique Paul LEADLEY, directeur du laboratoire d'écologie systémique et évolutive au sein de l'université Paris XI-Orsay, les études cherchant à illustrer l'impact du changement climatique montrent que le taux d'extinction de diverses espèces devrait augmenter de façon considérable au cours des prochaines décennies. Si les facteurs d'extinction sont connus (perte d'habitat, espèces invasives, surexploitation, pollution), le changement climatique pourrait devenir le facteur primordial de perte de biodiversité à l'échelle planétaire. Le taux de perte de biodiversité qui pourrait lui être attribué fait toutefois l'objet de vives controverses au sein de la communauté scientifique et aucun chiffre ne fait consensus sur ce point. Une chose est sûre : le changement climatique entraîne de nombreuses évolutions et migrations d'espèces. Tous les modèles prédisent par exemple que le changement climatique aura des impacts profonds sur la composition des forêts françaises. A l'échelle mondiale, des modèles empiriques du même type montrent que la toundra pourrait devenir une forêt boréale, où les arbres seront plus nombreux qu'aujourd'hui, tandis que les herbacées devraient subir un recul important. Un aspect moins souvent étudié concerne l'impact de la biodiversité sur le changement climatique. Il existe trois grands mécanismes par lesquels la biosphère peut modifier le climat : la modification du type de végétation et de la composition des systèmes aquatiques, qui peut modifier les flux des gaz à effet de serre ; la variation de la hauteur de la végétation, qui peut modifier les échanges d'eau et de chaleur entre la végétation et l'atmosphère ; l'émission dans l'atmosphère de particules par les êtres vivants et par les activités humaines (par exemple des composés organiques volatils), qui peut modifier la formation des nuages. Un premier exemple de ces effets est fourni par la forêt amazonienne : l'utilisation de forêts primaires pour des cultures intensives ou le pâturage modifie la pluviométrie à l'échelle locale et régionale. Le climat devient ainsi plus sec et plusieurs modèles suggèrent que cette sécheresse, à l'échelle régionale, pourrait induire le dépérissement des forêts, alimentant un cercle vicieux dont le résultat pourrait être la destruction totale de la forêt amazonienne. L'un des rares modèles prenant en compte cet effet prévoit, du fait de la disparition totale des forêts amazoniennes, une modification de la pluviométrie à l'échelle régionale (jusqu'aux Etats-Unis) et, par voie de conséquence, une augmentation sensible de la température de la Terre. Enfin, les quatre grands scénarios socio-économiques étudiés dans le cadre du Millenium Ecosystem Assessment montrent que les actions de mitigation du climat pourraient entraîner une perte de biodiversité à l'horizon 2050. Un changement de trajectoire, passant par une augmentation massive de l'efficacité agricole, l'utilisation raisonnée de biocarburants et la préservation de la biodiversité, aboutirait à une situation beaucoup plus favorable. Ces constats soulignent l'importance d'une discussion commune aux climatologues et aux spécialistes de la biodiversité. Or les débats menés actuellement au plan international se déroulent en l'absence de ces derniers, ce qui peut conduire à privilégier des choix non optimaux du point de vue de la prise en compte de la biodiversité. Voir sa présentation Jean-François SOUSSANA, chercheur à l'INRA , rappelle que la sous-alimentation atteint déjà un milliard de personnes dans le monde, selon laFAO. En 2008, les stocks mondiaux de grains ont été réduits à 40 jours de consommation et il est possible que le changement climatique ait joué un rôle dans cette situation. Un enjeu crucial réside donc dans la façon dont la production alimentaire mondiale parviendra à s'adapter au changement climatique. D'ores et déjà, la progression des rendements du blé ralentit en Europe et en Inde, sous l'effet de la sécheresse et de la variabilité du climat. Ce risque d'accroissement de l'insécurité alimentaire mondiale appelle une approche intégrative, liant les impacts du changement climatique, l'adaptation et l'atténuation du changement climatique. Or le potentiel futur d'atténuation des émissions nettes de CO2 résidera, pour une part importante, dans le secteur de l'agriculture et des forêts et utilisation des terres. S'il nous est possible, au plan mondial, d'obtenir une réduction nette des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2015, le réchauffement sera limité à2°C en 2065 ; si ces réductions ne s'amorcent qu'en 2035, c'est-à-dire en cas d'échec de la conférence de Copenhague, l'élévation de la température moyenne devrait atteindre 3°C. Par ailleurs, l'augmentation de la variabilité du climat aura pour conséquence une augmentation de la fréquence et de l'intensité des événements extrêmes. Des épisodes caniculaires, par exemple, poseront de graves difficultés du point de vue de la biodiversité mais aussi pour les productions agricoles. Il convient, certes, d'être prudent dans l'estimation de ces impacts, compte tenu d'une cascade d'incertitudes, relatives à l'évolution des émissions de gaz à effet de serre, à leur traduction en concentration ou encore aux modèles d'impact, qui demeurent imparfaits. Aussi apparaît-il nécessaire de réduire les incertitudes à l'échelle d'une petite région, afin d'anticiper le risque climatique et de le traduire en indices agro-climatiques utilisables par les praticiens. Nous devons aussi nous adapter aux dynamiques de la biodiversité, qui va faire apparaître de nombreux changements (aires de distribution d'agents pathogènes, physiologie des parasites et des hôtes, stratégies de protection sanitaire des végétaux...). Enfin, nous sommes face à de nouvelles frontières scientifiques, telles que la biologie moléculaire de l'adaptation, qui reste largement à explorer, ou les biotechnologies d'atténuation des émissions et les biotechnologies d'adaptation.
Voir sa présentation Philippe CHALMIN, professeur à l'université Paris IX Dauphine, observe que, selon les dernières projections, la population mondiale comptera 9,1 milliards d'individus en 2050 et près de 10 milliards en 2070. Les termes du défi alimentaire mondial sont ainsi posés : nous devons être capables de multiplier par deux la production agricole de la planète. Face à ce défi, l'outil de production est composé d'une surface agricole utile, soumise à diverses contraintes, d'une matière première indispensable (l'eau) et de sols confrontés à un risque croissant d'épuisement, ce à quoi s'ajoutent la sécheresse et des accidents climatiques de plus en plus récurrents. La première solution envisageable consiste à accroître la surface agricole utile à l'échelle mondiale. Tel est le credo de la FAO , qui estime que le potentiel de terres cultivables s'élève à 4,2 milliards d'hectares, alors que seul 1,6 milliard d'hectares est exploité aujourd'hui. Philippe CHALMIN fait part d'un avis divergent et considère qu'il est nécessaire de raisonner à surfaces agricoles utiles constantes. Dès lors, il n'est pas d'autre perspective viable que l'augmentation des rendements. Celle-ci peut résulter, pour partie, de meilleures pratiques agricoles. Cela suppose de doter les pays en voie de développement de politiques agricoles reposant sur les principes de la politique agricole commune, c'est-à-dire assorties de garanties de prix. Il y a là un potentiel considérable à exploiter, au regard du très bas niveau des rendements actuels, dans de nombreux pays. Cette évolution pourrait tout à fait s'accompagner de pratiques culturales plus responsables. Les OGM offrent une autre piste qui ne peut raisonnablement être écartée d'un revers de main. Certes, ils posent des problèmes nouveaux, que la communauté internationale doit s'approprier. On ne peut, toutefois, les ostraciser ni en faire un combat idéologique, tel que celui qui prévaut en France : le monde ne pourra pas se priver, au 21ème siècle, de biotechnologies, ne serait-ce que pour développer des plantes capables de mieux résister aux stress hydriques et de mieux capter l'azote de l'atmosphère. L'agriculture biologique n'est pas en mesure de nourrir 10 milliards d'êtres humains. Le changement climatique ajoute à ce constat une contrainte supplémentaire : le déplacement des zones de culture. Jacques WEBER, co-président du groupe de travail Orée sur la biodiversité et chercheur au CIRAD, après avoir précisé que les OGM n'étaient pas le problème, puisque le problème venait de la façon de s'en servir, souligne que la biodiversité ne réside pas dans les espèces mais dans la dynamique d'interactions entre organismes, dans des milieux qui sont eux-mêmes en changement. Nous aurons besoin de modèles pour penser des phénomènes aussi complexes. Le déclin des populations animales pose, parmi d'autres problèmes, le défi de l'accélération des processus, que l'on observe aussi dans le cas du changement climatique. Le problème ne réside pas tant dans la disparition d'une espèce que dans celle d'une somme d'interactions avec d'autres espèces, dont nous ignorons tout (à un instant donné et dans la durée). La vie est, certes, adaptative. On peut néanmoins se demander jusqu'à quel niveau d'accélération des changements elle est capable de s'adapter. Une autre idée reçue consiste à se féliciter de l'augmentation de la teneur de l'atmosphère en CO2, qui fertiliserait la forêt. Christian Körner, scientifique suisse, a étudié, dans la forêt nicaraguayenne, les conséquences du « forçage » en CO2. Si le développement de la végétation est stimulé, il apparaît que les principaux bénéficiaires sont les mousses et les lianes, qui fragilisent, à terme, la croissance des arbres. Le chercheur a également mis en évidence des seuils à partir desquels des effets indésirables sont observés, selon des cycles, avec un relargage massif de gaz à effet de serre en fin de cycle, la période séparant deux cycles se réduisant (à l'image des cycles économiques). La réflexion politique, autour du climat, a débuté en 1972. En matière de biodiversité, elle a été lancée à Rio en 1992. Sur le plan scientifique, les travaux du GIEC ont fait la preuve de leur validité et de leur robustesse. La méthode est éprouvée, c'est-à-dire qu'elle fournit les moyens de sa propre réfutation sur une base rigoureuse. Compte tenu du niveau de complexité des problèmes, il pouvait être envisagé de constituer une sorte de « réseau de réseaux », à l'échelle mondiale, afin de répondre à des questions soulevées par les décideurs publics. Une capacité à réaliser des états des lieux pourrait ainsi se développer, comme le fait le GIEC, qui est parvenu à réduire le problème du changement climatique à six ou sept variables. Une donnée nouvelle se fait jour : la crise, dont nous ne sommes pas encore sortis. Ses symptômes (expropriations, effondrement du produit intérieur brut, chute des marchés financiers) reflètent des raretés économiques objectives. Celles-ci se doublent, aujourd'hui, de raretés physiques. En témoigne par exemple la décroissance régulière et constante de la production mondiale de poissons. Plus largement, nous vivons dans un monde dans lequel la création de richesses repose essentiellement sur l'érosion d'un capital naturel : la destruction de celui-ci accroît le PIB, de même que la réparation des destructions précédentes. La communauté internationale pourrait décider de changer de modèle, afin de faire advenir un monde dans lequel la création de richesses serait issue de la maintenance ou de l'amélioration du potentiel naturel. Toutes les atteintes aux milieux naturels resteraient possibles, à des coûts toutefois si prohibitifs que les acteurs en seraient dissuadés. Les incitations économiques peuvent donc constituer un instrument puissant, à condition qu'elles soient mises en oeuvre dans une logique articulant les échelles globales et les échelles locales. C'est pourquoi une réforme des organisations internationales est indispensable, sur la base de principes d'équité internationale, étant entendu que la somme de régulations nationales n'aboutira jamais à une régulation mondiale. Jacques WEBER plaide ainsi pour la création d'une Organisation Mondiale de l'Environnement (regroupant la FAO , le PNUD et le PNUE ), qui soit dotée d'un pouvoir réel de mise en oeuvre, à l'échelle mondiale, des décisions prises par ses membres. Elle pourrait se donner pour ambition de déplacer le poids des régulations, afin que celles-ci portent essentiellement sur les consommations de nature, en lieu et place de charges pesant sur l'outil de travail (capital manufacturier) et le travail (capital humain). Dans le domaine de l'énergie, la régulation pourrait prendre la forme d'une taxe sur l'énergie ajoutée, dont le produit serait redistribué en raison inverse des consommations énergétiques. La redistribution serait ainsi effectuée au profit des pays dont la consommation énergétique est la plus faible. Incidemment, le travail devrait réapparaître, là où il se faisait plus rare, dès lors que les régulations élèvent le prix de l'énergie et rendent le travail moins coûteux.
Voir sa présentation Les leçons de cette conférence ont été tirées avec humour par Marie BLANDIN, Sénatrice et Vice-Présidente du Comité pour la biodiversité, qui a conclu que ce n'est plus de confort mais de survie dont on doit débattre à Copenhague en décembre 2009 et à Nagoya en 2010. Elle a rappelé que la construction d'un consensus solide sur le diagnostic et l'action reposera sur les faits scientifiques, les observations dynamiques et le partage populaire de ce savoir. Pour ce faire, il est indispensable d'accepter la complexité, la communauté de destins du Nord et du Sud, et notre étroite dépendance des écosystèmes ; elle précise qu'il était temps de prendre les chemins d'une autre vie, où il est prouvé que l'on s'y épanoui beaucoup plus. Les videos des interventions seront disponibles prochainement sur le site Orée , de même que les actes intégraux en français et en anglais. Nous vous tiendrons informés de la mise à disposition de ces fichiers au plus vite. |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire